Transitions & Energies
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Quand Emmanuel Macron se rallie au protectionnisme vert


Bonus réservé aux voitures électriques fabriquées en Europe, crédit d’impôt industrie verte pour les batteries, les pompes à chaleur, les éoliennes, les électrolyseurs, les piles à combustible, les panneaux solaires, la capture du CO2, les carburants synthétiques…, pause dans la réglementation environnementale européenne, accélération des commandes publiques, le président de la République veut donner une chance à l’industrie française de survivre à la transition énergétique.

Le président de la République Emmanuel Macron s’est exprimé jeudi 11 mai à l’Élysée à la suite d’une table ronde consacrée à la réindustrialisation du pays. La transition énergétique en représente l’axe presque unique. Les mesures et stratégies annoncées s’inspirent d’ailleurs très clairement de l’Inflation Reduction Act (IRA) américain, une loi adoptée par le Congrès en août 2022. Il s’agit d’un vaste plan de subventions de plus de 400 milliards de dollars aux filières industrielles de la transition énergétique qui a instauré de fait aux Etats-Unis un protectionnisme vert. Le président de la République a eu beau se défendre de faire du protectionnisme, il n’a pas échappé à la contradiction en déclarant «ne pas [vouloir ndlr] utiliser l’argent du contribuable français pour accélérer l’industrialisation non européenne». Si ce n’est pas la définition du protectionnisme… L’initiative, pour ce qui est en tout cas de l’industrie automobile française, semble déjà bien tardive.

Une pause dans la réglementation pour ne pas «perdre tous les acteurs»

Il faut en tout cas tenter de gagner du temps. Voilà pourquoi pour permettre à l’industrie européenne et française de faire face aux défis qui lui sont imposés par les dirigeants politiques, à la fois technologiques et économiques, Emmanuel Macron a demandé une «pause réglementaire européenne» sur les contraintes environnementales. «Il ne faut pas que l’on fasse de nouveaux changements de règles, on a besoin de stabilité», a-t-il plaidé. Le président a rappelé au passage le niveau très élevé d’exigence environnementale qui s’impose aux industriels en Europe, et qui n’a pas d’équivalent ailleurs dans le monde. «On est devant, en termes règlementaires, les Américains, les Chinois ou toute autre puissance au monde», a affirmé le chef de l’Etat. «Maintenant il faut qu’on exécute. Il ne faut pas qu’on fasse de nouveaux changements de règles, parce qu’on va perdre tous les acteurs… Le risque est d’être les mieux-disant en termes de réglementation et les moins-disant en termes de financement».

Reste à savoir si les technocrates hors sol de Bruxelles seront capables de renoncer à leur heure de gloire qui consiste à imposer des objectifs toujours plus ambitieux, toujours plus irréalistes et toujours plus dangereux pour le tissu économique et social européen. 

Crédit d’impôt pour déclencher 20 milliards d’euros d’investissements

A l’échelle franco-française, le Président a annoncé la création d’un crédit d’impôt industrie verte. Un mécanisme «très simple, visible pour les industriels et immédiat», qui doit permettre de déclencher «20 milliards [d’euros] d’investissements d’ici 2030» sur le territoire national. Ce crédit d’impôt pourra bénéficier aux technologies «identifiées dans les textes européens», comme les batteries, les pompes à chaleur, les éoliennes, les électrolyseurs, les panneaux solaires, la capture du CO2, les piles à combustible, les carburants synthétiques… Il s’agira de donner aux filières industrielles françaises le temps et les moyens qui leur font défaut. Les commandes publiques joueront aussi un rôle dans ce sens en accélérant les commandes prenant en compte les critères environnementaux «pour les produits clés de la décarbonation» dès juillet 2024 au lieu de 2026.

Un bonus écologique réservé aux voitures européennes

Emmanuel Macron a aussi annoncé une révision des critères d’attribution du bonus automobile pour les véhicules dits propres , «pour mieux prendre en compte l’empreinte carbone de la production du véhicule». Un argument servant à justifier le soutien apporté aux «batteries et aux véhicules produits en Europe», et à éviter que les bonus et subventions bénéficient avant tout aux constructeurs asiatiques ou américains qui dominent déjà le marché. Emmanuel Macron a annoncé que cette solution de «bon sens» sera effective «d’ici la fin de l’année».

Le bonus écologique tel qu’il existe aujourd’hui est une aide financière attribuée à tout acquéreur ou locataire (titulaire d’un contrat de location d’une durée supérieure ou égale à deux ans) d’un véhicule électrique. Depuis le 1er janvier 2023, le bonus écologique pour l’acquisition d’un véhicule neuf est réservé aux voitures particulières électriques dont le coût d’acquisition est inférieur à 47.000 euros et la masse inférieure à 2,4 t, aux camionnettes électriques, aux deux ou trois-roues et quadricycles à moteur électrique et aux vélos avec ou sans assistance électrique. Le montant de l’aide peut s’élever jusqu’à 5.000 euros pour l’acquisition d’une voiture et 6.000 euros pour une camionnette. Ces montants sont majorés de 2.000 euros pour les ménages dont le revenu fiscal de référence par part est inférieur ou égal à 14.089 euros, soit une aide maximale de 7.000 euros pour l’acquisition d’une voiture et de 8.000 euros pour une camionnette.

La rédaction