Transitions & Energies

Production électrique: retour progressif à la normale


Après une année 2022 qui a été la plus mauvaise depuis des décennies, les capacités françaises de production électrique remontent progressivement en dépit de la découverte de nouveaux problèmes de fissures sur certains réacteurs nucléaires, de la sécheresse persistante et des conséquences du mouvement social contre la réforme des retraites. Sauf mauvaise surprise, la France devrait ainsi redevenir fortement exportatrice d’électricité cette année. Une bonne nouvelle pour le commerce extérieur qui en a bien besoin.

La production électrique française a vécu une année 2022 catastrophique. Entre problèmes de corrosion sous contrainte et retour de maintenance de nombreux réacteurs nucléaires et la sécheresse qui a affecté les centrales hydroélectriques, jamais en plusieurs décennies le pays n’avait aussi peu produit. Pour donner un ordre d’idée, la production d’électricité nucléaire a été l’an dern ier la plus faible depuis 1988 et la production hydroélectrique est revenue à son niveau de 1976, autre grande année de sécheresse.

Et la situation a mis du temps à s’améliorer. Si les efforts des équipes d’EDF allant même jusqu’à faire appel à des soudeurs nord-américains ont permis de redémarrer un certain nombre de réacteurs durant l’hiver permettant d’assurer le passage des mois les plus froids, le mouvement social contre la réforme des retraites, la détection de nouveaux problèmes de fissures sur certains réacteurs mais aussi le manque de précipitation ont fait peser de nouveaux doutes sur la tenue des plannings. Une habitude…

Une production nucléaire supérieure de 30% à fin avril 2023 par rapport à la même période de 2022

Finalement, si les calendriers de maintenance ont effectivement légèrement dérapé, la situation s’améliore inexorablement, et nous terminons le mois d’avril avec une production nucléaire 30% supérieure à ce qu’elle était à la même époque l’an dernier.

C’était en effet à la fin du printemps et durant l’été qu’un grand nombre de réacteurs avaient dû être arrêtés il y a tout juste un an. Et c’est pourquoi ce sont sur ces mois « chauds » que les besoins en importation avaient été les plus importants.

Rien de tout cela cette année. Le mois d’avril aura ainsi marqué un niveau d’exportations nettes plus atteint depuis 2021, signe d’un retour progressif à la normale. Mieux, en débutant les mois chauds avec quasiment 40GW de puissance disponible (niveau qui devrait être constant jusqu’à septembre), le pays est quasiment assuré de n’avoir à recourir aux importations que dans de très rares cas, contrairement à l’an dernier.

Les marchés sceptiques

Cependant, les marchés restent sceptiques sur cette embellie temporaire de la situation. Et s’ils restent très en dessous de leurs niveaux records de l’an dernier, les prix de l’électricité de gros se maintiennent à des niveaux largement supérieurs à avant la crise à plus de 100 euros le MWh en moyenne.

Il faudra ainsi confirmer durant les prochains mois pour voir baisser durablement les prix de l’électricité pour 2024 et 2025 et retrouver des tarifs acceptables pour l’économie, les entreprises et les finances publiques, qui pour les particuliers absorbent une bonne part de la note réelle.

L’impact devrait aussi être majeur sur la balance commerciale du pays. Importateur net pour la première fois depuis plus de 40 ans en 2022, la conséquence avait été un déficit commercial sur l’électricité de plus de 7 milliards d’euros. Le commerce extérieur français n’avait pas besoin de cela.

Solde cumulé des exportations et importations françaises d’électricité en TWh. Source RTE.

Le retour de la France à la place qui est la sienne (l’un des principaux si ce n’est le premier exportateur européen) dès 2023 devrait donc réduire cette année le déficit commercial de plus de 10 milliards d’euros. Une bonne nouvelle macro-économique suffisamment rare pour être soulignée.

Ne reste plus qu’à espérer que la malchance touchant EDF depuis presque deux ans avec l’accumulation de mauvaises nouvelles prenne enfin fin pour retrouver un peu de sérénité sur les marchés et – in fine – sur la facture des entreprises.

Philippe Thomazo

La rédaction