Transitions & Energies

L’Etat veut tester la limitation contrainte de la consommation d’électricité dans 200.000 foyers


En cas d’hiver rigoureux, et même si les capacités de production électrique du pays se sont rétablies cette année avec la remise en service d’un grand nombre de réacteurs nucléaires en maintenance, le risque de pénurie et même de blackout existe toujours. La faute à l’incapacité des gouvernements depuis 20 ans à anticiper les besoins et à la faiblesse des renouvelables intermittents, éolien et solaire, très peu productifs au cœur de l’hiver. Seule solution, réduire les besoins des entreprises et… des particuliers. Le retour des fameux délestages. Le gouvernement envisage ainsi de tester la limitation temporaire et contrainte de la consommation d’électricité pour les particuliers. Un projet de décret est en cours de rédaction. Environ 200.000 foyers prévenus à l’avance verraient la puissance de leur compteur Linky baisser de moitié pendant quelques heures. Il n’y aura pas de recours possible ni aucune indemnisation.

Avec l’arrivée de l’hiver, la crainte de pénuries d’énergie et plus particulièrement d’électricité en cas de températures très basses ressurgit. Si les capacités de production électrique françaises sont bien supérieures à celles de l’an dernier avec la remise en service d’un grand nombre de réacteurs du parc nucléaire affectés par des retards de maintenance et des problèmes de corrosion sous contrainte, cela n’efface pas le déséquilibre potentiel entre production et consommation en cas de grand froid. Une conséquence des errements depuis deux décennies des gouvernements successifs incapables d’anticiper les besoins. D’autant plus, que les renouvelables intermittents, éolien et solaire, produisent en général très peu pendant les périodes de grand froid, faute d’ensoleillement au cœur de l’hiver et du fait d’un manque de vent lié alors la plupart du temps à la présence d’un anticyclone sur la France.

Voilà pourquoi, le seul moyen de faire face en cas d’hiver rigoureux serait de réduire la consommation électrique, des entreprises, notamment industrielles, et aussi des particuliers. Les fameux délestages qui étaient annoncés il y a un an et qui par la grâce d’un hiver 2022-2023 très clément et d’une baisse de la consommation résultant notamment de l’envolée des prix ont été évités. La Tribune a ainsi révélé que le gouvernement compte tester dans les prochains mois la limitation temporaire de la puissance électrique délivrée aux particuliers, pour voir si cet outil est techniquement efficace en cas de déséquilibre extrême sur le réseau électrique.

Projet de décret

Un projet de décret est en cours de rédaction pour poser le cadre de l’expérimentation. Il s’agirait de limiter la puissance des compteurs Linky d’environ 200.000 foyers, heureusement prévenus à l’avance par courrier, pendant quelques heures. L’opération serait réalisée une fois, au cours de l’hiver 2023-2024. Voilà qui ne va pas renforcer la popularité des compteurs Linky…

Et le ministère de la Transition énergétique a beau affirmer que le test n’a rien à voir avec des risques possible cet hiver pour le système électrique, c’est assez difficile à croire. D’autant plus que depuis des mois l’exécutif encourage les Français à souscrire volontairement à des offres dites « à pointe mobile ». Elles incitent à diminuer la consommation d’électricité pendant les heures ou jours de pic de consommation en augmentant les tarifs à ces moments précis.

Aucun recours ni indemnisation

En tout cas, le réseau de distribution d’électricité aux particuliers Enedis prépare le fameux test. Il consisterait à abaisser la puissance disponible des compteurs Linky généralement de 6 kVA à 3 kVA. Cela permettrait en cas de risque de blackout de préserver un niveau minimum d’alimentation pour ce qui est qualifié d’usages électriques de base, 3 kVA correspondant selon Enedis à un radiateur, un ordinateur portable en charge et un réfrigérateur. Les pouvoirs publics comptent effectuer ce test en une seule fois pour quelques heures et sur un périmètre d’environ 200.000 foyers, qui seront prévenus à l’avance par courrier assure le ministère.

Le dispositif sera soumis, mais seulement pour avis consultatif, au Conseil supérieur de l’énergie du 26 octobre en vue de la publication ensuite d’un texte réglementaire. Le décret prévoit que le test sera mené cet hiver, avant le 31 mars 2024. Il précise que l’opération vise à «déterminer s’il est possible techniquement de mettre en œuvre une nouvelle mesure hors marché […] si la disponibilité des moyens de production d’électricité est moindre». Afin de «réduire ou éviter le recours au délestage». L’expérimentation devrait avoir lieu un jour ouvré «entre 6h30 et 13h30 et entre 17h30 et 20h30», pendant une durée maximale de 4 heures, sans aucun recours ni indemnisation possible de la part de l’Etat.

La rédaction