Transitions & Energies
Turbine Arabelle

La vente des turbines Arabelle d’Alstom à l’américain GE, une tache qui ne s’efface pas


Annoncée en février 2022, en prélude à la soudaine conversion d’Emmanuel Macron à l’énergie nucléaire, la vente des activités nucléaire de l’américain General Electric (GE) à EDF et notamment de la fabrication des surpuissantes turbines à vapeur Arabelle tarde toujours à se concrétiser. Elle aurait dû être enfin finalisée le 1er décembre dernier mais a été une fois encore reportée. Elle permettrait d’effacer la vente désastreuse de cette activité à GE en 2015 par le français Alstom orchestrée par le ministre de l’Economie de l’époque, un certain Emmanuel Macron. La transaction bloque pour des raisons officielles, la présence parmi les acheteurs des turbines Arabelle du russe Rosatom, et officieuses… Avec la relance du nucléaire dans le monde, Washington a beaucoup moins envie de voir la France remettre la main sur les turbines Arabelle.

C’est comme un Sparadrad dont le « Mozart de la finance » n’arrive pas à se débarrasser. La vente désastreuse des activités nucléaires d’Alstom à l’américain General Electric (GE), orchestrée et voulue par Emmanuel Macron en 2014 quand il était Secrétaire général adjoint de l’Elysée et en 2015 quand il était ministre de l’Economie et des Finances de François Hollande, n’est toujours pas effacée. Une opération qui a tourné au fiasco. GE n’a jamais tenu ses engagements en matière de technologie comme d’emplois. Au lieu de développer la société, le groupe américain n’a cessé de tailler dans ses effectifs. En huit ans, le conglomérat américain a supprimé 5.000 postes en France dont 1.200 dans l’usine de Belfort. Là même où Emmanuel Macron a acté sa soudaine conversion à l’énergie nucléaire dans un discours en février 2022… après l’avoir affaiblie pendant une décennie.

Les turbines à vapeur les plus puissantes au monde

Pour tenter d’effacer son erreur, le Président avait contraint en février 2022, à la veille de son discours et à l’approche de l’élection présidentielle, EDF à racheter à GE et au prix fort GE Steam, la branche nucléaire du conglomérat américain qui comprend notamment la fabrication à Belfort des célèbres turbines Arabelle qui équipent les centrales nucléaires…

Elles sont les plus puissantes au monde, 1.100 tonnes et 70 mètres de long, et produiront l’électricité des nouvelles centrales construites par EDF, comme l’EPR de Flamanville ou les deux EPR d’Hinkley point au Royaume-Uni, mais aussi des projets menés par le russe Rosatom en Turquie, en Hongrie, en Bulgarie et en Egypte. Et c’est là où le bât blesse.

La présence parmi les clients de GE de Rosatom est l’obstacle officiel à la finalisation de la transaction, du fait de l’invasion de l’Ukraine par la Russie et des sanctions qui en ont découlé contre Moscou.

La vente aurait dû être officialisée le 1er décembre 2023, depuis plus rien

Pourtant, le 1er décembre dernier, le rachat par EDF de GE Steam, la branche nucléaire du géant américain General Electric, devait être enfin acté. L’administration américaine avait avalisé ce qui est considéré à Washington comme un transfert de technologie… Une cérémonie était même prévue pour célébrer l’événement avant d’être annulée au dernier moment. Depuis plus rien, à la grande colère des salariés de Belfort.

« C’est une question d’État à État, a tout de même fini par lâcher il y a quelques jours lors d’une conférence de presse Robert Poggi, directeur à l’action régionale du groupe EDF en Bourgogne-Franche-Comté. Ce n’est plus une question de négociation financière entre GE et EDF, mais plutôt géopolitique entre les États-Unis, la France et la Russie. »

En fait, ce n’est pas seulement Rosatom qui pose problème… mais la relance du nucléaire dans le monde. De plus en plus de pays ont décidé de construire de nouvelles centrales. Ils sont pas moins de 22 à avoir ainsi pris l’engagement en décembre dernier lors de la COP28 de tripler la production d’électricité nucléaire dans le monde d’ici 2050. Ce qui se traduira par des centaines de milliards d’euros ou de dollars d’investissements. Et ce n’est pas tout. Plus d’une dizaine d’Etats américains envisagent de remplacer leurs centrales à charbon par des centrales nucléaires.

Equiper les réacteurs nucléaires du futur

Français, Américains, Coréens, Russes et Chinois sont en compétition pour construire les réacteurs du futur. En bloquant le rachat d’Arabelle, Washington priverait les Français d’un atout précieux.

La France a fort heureusement encore quelques arguments à faire valoir. EDF et GE ont signé en février 2022 « un accord d’exclusivité » pour négocier le rachat de GE Steam Power. L’Agence des participations de l’Etat (APE) détient un contrôle sur le destin de cette activité car elle possède une Golden Share (action préférentielle) dans la structure qui au sein de GE fabrique les turbines pour centrales nucléaires. GE Steam Power a environ 9.000 salariés dans le monde dont 2.700 en France.

La rédaction