Transitions & Energies

Le Qatar, profiteur de guerre


Le pays qui profite le plus économiquement et diplomatiquement des guerres en Ukraine et à Gaza, ce n’est pas l’Iran, la Chine ou les Etats-Unis, mais le Qatar. A la suite notamment de la destruction des gazoducs russes NordStream 1 et 2, la petite péninsule désertique multiplie les investissements pour augmenter considérablement ses capacités d’exportations de GNL (Gaz naturel liquéfié) et signe des contrats d’approvisionnement de très long terme avec la France, l’Allemagne et la Chine. Etant devenu un intermédiaire obligé entre Israël et le Hamas, les messages troubles de sa chaîne de propagande islamiste Al Jazeera, son rôle de financier du Hamas et les réseaux de corruption mis en place au Parlement européen à Bruxelles et au sein du Sénat américain sont passés sous silence… Et l’agence de notation Moody’s vient même de relever la note de crédit du Qatar à Aa2, le troisième niveau le plus élevé, l’équivalent de celles de de la France ou de la Corée du sud.

Même s’il a perdu l’an dernier sa place de premier exportateur mondial de GNL (Gaz naturel liquéfié), supplanté par les Etats-Unis et même dépassé par l’Australie, l’avenir énergétique et politique du Qatar reste radieux. De nouvelles et importantes capacités de production vont être mises en service dans les toutes prochaines années. Auréolée du succès de sa Coupe du monde football et du poids planétaire grandissant de sa chaîne d’information et de propagande islamiste Al Jazeera, la petite péninsule désertique au bord du Golfe persique collectionne les succès. A tel point que l’agence de notation Moody’s vient de relever sa note de crédit à Aa2, le troisième niveau le plus élevé, l’équivalent de celles de de la France ou de la Corée du sud. Pour un pays qui compte un peu plus de 3 millions d’habitants et 300.000 citoyens…

Du coup, si on s’interroge pour savoir quel pays profite le plus depuis deux ans des guerres en Ukraine et à Gaza, ce ne sont pas l’Iran, la Chine ou les Etats-Unis… mais bien le Qatar. L’invasion de l’Ukraine et la destruction des gazoducs russo-allemand NordStream 1 et 2 ont fait aujourd’hui du Qatar l’un des principaux fournisseurs de gaz naturel de l’Europe tandis qu’auparavant il livrait avant tout l’Asie. Résultat, une multiplication de contrats à long, et même très long terme, de fourniture de GNL (Gaz naturel liquéfié) avec l’Allemagne, la France… mais aussi la Chine qui entend ainsi sécuriser ses approvisionnements. Par ailleurs, des investissements considérables ont été lancés pour augmenter les capacités de production du Qatar avec l’appui de groupes pétroliers occidentaux dont TotalEnergies.

Le Qatar échappe à toutes les critiques et sanctions sur sa duplicité, son opportunisme et son rôle de corrupteur

Quant au conflit entre Israël et le Hamas, il a encore renforcé le poids diplomatique du Qatar qui a pour stratégie de jouer dans tous les camps, celui des pays occidentaux comme celui des islamistes. Il est ainsi devenu un intermédiaire incontournable entre le Hamas et Israël tout en étant de fait un allié et le principal soutien financier du mouvement terroriste islamiste. Sans le Qatar, le Hamas se serait effondré économiquement… Mais devenu indispensable, le Qatar échappe à toute critique et plus encore aux sanctions tout en apportant son appui à des mouvements terroristes reconnus comme tels par l’Europe et les Etats-Unis. La découverte d’un incroyable réseau de corruption au sein même du Parlement européen à Bruxelles, le Qatargate, est presque passé inaperçue… L’enquête belge est même en train de s’enliser. Il faut y ajouter les sérieux soupçons de corruption par le Qatar du sénateur américain du New Jersey, Bob Menendez, membre de la Commission des affaires étrangères!

Pour en revenir à l’énergie, le Qatar, premier exportateur mondial de GNL entre 2011 et 2022, vient de connaître une éclipse très passagère et devrait retrouver assez rapidement sa première place. Il va aussi bénéficier de la réticence environnementale de l’administration Biden à poursuivre le développement des exportations américaines de GNL et à l’instauration récente d’un moratoire sur la construction de nouveaux terminaux. Mais ce sont surtout les projets spectaculaires de développement de ses capacités de production, les plus importants au monde, qui vont lui permettre de redevenir le numéro un. Il s’agit des champs nord, précisément North field east et North field south, du plus important gisement de gaz au monde que le Qatar partage dans le Golfe persique avec l’Iran, avec qui il entretient d’excellentes relations… Tout en ayant sur son sol des bases militaires américaine, dont l’existence vient juste d’être prolongée de dix ans, et française (dite informelle) et en ayant des relations diplomatiques officieuses avec Israël.

Les Occidentaux ont besoin de ses investissements, de ses cadeaux… et surtout de son gaz

Mais les Occidentaux ne sont pas prêts de reprocher au Qatar sa duplicité et son opportunisme. Ils ont besoin de ses investissements, parfois de ses cadeaux au monde politique… et surtout de son gaz. Et il va en produire de plus en plus. La première phase de développement des champs North field east et North field south doit permettre d’augmenter la capacité de production du Qatar de 43%, passant de 77 à 110 millions de tonnes par an d’ici 2025. La deuxième phase fera passer d’ici 2027 la capacité de production de 110 à 126 millions de tonnes, soit une augmentation totale de 64%…

Illustration du rôle grandissant que va jouer et pour longtemps le Qatar comme fournisseur de gaz à l’Europe et à la France, Doha et TotalEnergies ont signé en octobre dernier deux accords majeurs d’approvisionnement en GNL pour une durée de 27 ans. «Des filiales de QatarEnergy et de TotalEnergies ont signé deux accords de vente et d’achat pour fournir jusqu’à 3,5 millions de tonnes par an de GNL du Qatar à la France», a annoncé QatarEnergy.

Une vraie bénédiction

La guerre en Ukraine et celle à Gaza ont offert au Qatar une fantastique opportunité de renforcer et consolider son soft power et pour longtemps ses lucratives exportations de GNL. On peut parler d’une vraie bénédiction. En novembre 2022, deux contrats ont montré la voie. L’un avec l’Allemagne pour fournir 2 millions de tonnes par an de GNL pendant quinze ans et un autre de 27 ans avec le géant chinois Sinopec pour 4 millions de tonnes. En juin dernier, le Qatar a signé un autre contrat, toujours de 27 ans, mais cette fois avec China National Petroleum et toujours pour 4 millions de tonnes par an.

La rédaction