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Flamanville Chantier EDF

Le plan d’EDF pour sauver l’industrie nucléaire


EDF a présenté la semaine dernière son plan pour permettre à la filière nucléaire française de retrouver une crédibilité industrielle et se remettre du désastre du chantier de l’EPR de Flamanville. Au même moment ou presque une bonne nouvelle pour le nucléaire est venue de Bruxelles. L’Union européenne a fini par reconnaître que cette source d’énergie contribue aux objectifs de neutralité carbone. Il faut dire que l’électricité nucléaire émet aussi peu de CO2 que les éoliennes et même bien moins que le solaire.

Le plan d’EDF baptisé «excell,  pour excellence, a été rendu public seulement un peu plus d’un mois après la publication du rapport de Jean-Martin Folz soulignant la perte de savoir-faire de l’industrie nucléaire française et sa difficulté à construire de nouveaux réacteurs. Les travaux de l’EPR de nouvelle génération de Flamanville (voir la photo ci-dessus), lancés en 2007, devaient se terminer en 2012 pour un coût initial estimé à 3,3 milliards d’euros. La facture devrait dépasser 13 milliards et le démarrage du réacteur n’interviendra pas avant le début de l’année 2023 à la suite d’une incroyable série de malfaçons, de contrôles bâclés et même de dissimulations. Ce n’est pas la technologie ni même la conception des EPR qui sont en cause, mais la capacité à les fabriquer avec la qualité nécessaire du béton, de la cuve du réacteur et des soudures… Pour preuve, les deux EPR chinois, construits sur les plans français, Taishan 1 et Taishan 2, ont été mis en chantier bien après Flamanville et sont aujourd’hui en service…

Si on ajoute à cela l’impopularité, en partie irrationnelle, de l’énergie nucléaire, les dirigeants d’EDF n’ont plus droit à l’erreur tandis que la question du vieillissement et du renouvellement du parc de 58 réacteurs devient urgente. D’ici à la mi-2021, EDF doit présenter au gouvernement un «EPR 2» simplifié et moins cher à construire. L’électricien table sur la construction de six EPR 2 d’ici à 2035 et la fermeture de réacteurs anciens, mais il doit encore convaincre sur sa capacité à tenir ses engagements.

Bruxelles reconnait la capacité du nucléaire à limiter les émissions de CO2

«La filière nucléaire française connaît des temps difficiles et aujourd’hui il nous faut lancer le sursaut», a expliqué le président d’EDF, Jean-Bernard Lévy. Le plan «excell» prévoit notamment la refonte des relations avec les fournisseurs, qui seront mieux associés aux spécifications et une standardisation des procédés. Un «délégué général à la qualité industrielle et aux compétences», qui rendra directement compte au PDG, va être nommé. Il «sera recruté dans l’industrie française, mais pas dans le nucléaire, car nous devons nous remettre en cause en tirant profit des meilleures pratiques d’autres industries», explique Jean-Bernard Levy. Un «plan soudure» va être lancé. Le groupe compte également créer une «université des métiers du nucléaire» et recruter 5.000 personnes dans les trois ans.

À Bruxelles, le nucléaire faisait également l’objet des débats lors du sommet européen consacré notamment aux moyens pour l’UE d’atteindre la neutralité carbone à l’horizon 2050. Très anti-nucléaires, l’Allemagne, l’Autriche et le Luxembourg ont pourtant fini par céder, sous la pression notamment de la France de la République Tchèque et de la Hongrie. Ils ont accepté que l’énergie nucléaire soit considérée comme un moyen de réduire les émissions de CO2. Cette reconnaissance ouvre la voie à des aides et des subventions.

Le premier ministre tchèque Andrej Babis a dénoncé au passage l’hypocrisie des pays opposés au nucléaire qui s’approvisionnent pourtant abondamment en électricité auprès des réacteurs tchèques et français. «Ce matin, à 7 h 45, les Autrichiens ont consommé 23% d’électricité tchèque, la Slovaquie 30%. Si nous n’avions pas fourni de l’énergie à l’Autriche, un quart des habitants n’aurait même pas pu se faire un café», a-t-il affirmé.

La rédaction