Transitions & Energies

A Saint-Nazaire, le premier parc éolien marin français va entrer en service


C’est une première en France. Installées à 18 kilomètres au large de Saint-Nazaire, 80 éoliennes seront mises en service d’ici à la fin de l’année pour produire l’équivalent de 20% de la consommation domestique en électricité de la Loire-Atlantique. Quand il y aura du vent…

Les éoliennes marines sont à la mode, au gouvernement et dans les lobbys économiques et politiques des renouvelables. Elles présentent plusieurs avantages. Elles sont plus puissantes et moins intermittentes que leurs homologues terrestres et se heurtent en théorie à moins d’oppositions locales. Ce dernier point reste à modérer. Les nuisances visuelles existent. Et dans la baie de Saint-Brieuc comme au large de Dunkerque, tenter de passer en force pour installer des parcs éoliens marins tourne au fiasco technique et juridique. Et puis la fabrication des parcs en mer et leur entretien est plus coûteux qu’à terre. Mais peu importe… le contribuable subventionnera.

En tout cas, au large de Saint-Nazaire, le premier parc éolien offshore français vient de franchir un cap décisif avec la pose du dernier mât annoncé par l’équipe de gestionnaire il y a quelques jours. Sur 78 km2 d’océan, à 12 km des côtes, se dressent désormais 80 éoliennes «Haliade 150» d’une puissance de 6 MW chacune construite par Général Electrics.

Dépasser les limites de l’éolien terrestre

La promesse de l’éolien marin, pour justifier ses coûts, est celle de dépasser les limites de l’éolien à terre. Avec un facteur de charge (temps effectifs de fonctionnement à la puissance nominale) de 40% contre 25% à terre, et une puissance installée permettant de répondre à la demande de 20 % des foyers de Loire Atlantique, EDF souhaite démontrer l’intérêt de cette première installation.

Si la partie visible de ce chantier est maintenant achevée -déclenchant son lot de polémiques sur le caractère plus ou moins visible du parc depuis la côte- celui-ci ne sera mis définitivement en production qu’au début de l’hiver, le temps d’achever le travail de câblage de chacune des éoliennes jusqu’à la sous-station électrique.

Une filière industrielle se met en place

Ces éoliennes sont en tout cas les premières à être issues d’un nouvel écosystème industriel. De l’usine de pâles (Cherbourg), jusqu’aux nacelles et génératrices (Saint Nazaire) en passant par l’ingénierie (Nantes) ou la sous-station (Guérande), il y eu dès le départ la volonté de développer un savoir faire sur le territoire français pour cette filière.

La dépendance aux importations est l’un des reproches majeurs fait aux énergies renouvelables. Dès lors, la création d’une véritable filière française du offshore permettait de lever une partie des obstacles à son développement. D’autant plus, quelque soit le scénario suivi de transition énergétique dans les prochaines années et décennies, le développement du offshore semble indispensable. Ce qui n’empêchera pas les polémiques.

Nuisance visuelle

Et à Saint-Nazaire entre les promesses d’intégration dans le paysage du parc et la réalité il y a une sérieuse différence… Depuis cet été, c’est un débat permanent sur le front de mer. Les projections 3D présentées lors de l’enquête publique ont clairement sous-estimé l’impact visuel du parc offshore. L’équipe chargée du chantier s’en défend, en mettant en parallèle les projections et les photos. Certains élus locaux pensent le contraire… demandant par conséquent une réévaluation des compensations.

Sur la plage, l’apparition des mâts à l’horizon fait aussi beaucoup parler. Certains pensent que c’est un mal nécessaire, d’autres considèrent que le paysage est irrémédiablement gâché.

Voilà pourquoi, certains parient sur une autre technologie pour réussir en France à multiplier les parcs éoliens marins, celle de l’éolien flottant qui permet d’éloigner bien plus les parcs éoliens des côtes et de faire disparaître la nuisance visuelle. Et qui permet de surmonter l’absence le long des côtes en France de fonds de faible profondeur facilitant l’installant des parcs fixes.

Car comme l’explique Patrice Cahart, ancien inspecteur général des finances et auteur du livre «La Peste éolienne», «la côte française ne dispose pas de fonds de faible profondeur, ce qui entraîne des coûts élevés pour implanter des éoliennes. Les fonds sont d’environ 30 mètres en France, contre 5 au Royaume-Uni et au Danemark, les champions de l’éolien offshore. En moyenne, les éoliennes en mer produisent donc une électricité en France à un prix deux fois supérieur à celui des éoliennes terrestres… ».

Philippe Tomazo

La rédaction