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Barrage de Monteynard

Hydroélectricité: une production «historiquement faible»


La production hydro-électrique est en baisse en France de plus de 20% depuis le début de l’année. Le remplissage des barrages, victime de la sécheresse, est très en retard. Un possible problème supplémentaire pour la production d’électricité cet hiver. Car non seulement, l’hydroélectricité est la première source d’électricité renouvelable, mais elle a l’immense avantage d’être pilotable et pas intermittente. C’est-à-dire disponible à la demande pour faire face aux besoins.

Dans la conjonction assez incroyable de difficultés accumulées dans la production et l’accès à l’énergie depuis plusieurs mois, il ne faut pas oublier les problèmes de remplissage des barrages hydroélectriques. Ils viennent s’ajouter à l’envolée des prix du gaz et de l’électricité, notamment en Europe, aux conséquences de l’invasion de l’Ukraine par la Russie, aux problèmes de maintenance du parc nucléaire français, aux difficultés d’approvisionnement de certains produits pétroliers du fait du manque de capacités de raffinage.

Et le manque de précipitations ne permet pas depuis plusieurs mois de remplir suffisamment les barrages ce qui se traduit par une baisse sensible de la production hydroélectrique qui est de loin, la première source d’électricité renouvelable et la deuxième de production électrique derrière le nucléaire. L’an dernier, l’hydroélectrique a assuré 12% de la production électrique du pays (13% en 2020) contre 7% pour l’éolien et 3% pour le solaire.

Mais comme le souligne l’Agence internationale de l’énergie (AIE), l’hydroélectricité fait figure aujourd’hui de «géant oublié» de la production électrique bas carbone.

Une production intermittente mais pas aléatoire

La plupart des barrages français se trouvent dans les Alpes, les Pyrénées et le Massif central. Par rapport aux autres renouvelables, notamment éolien et solaire, ils présentent l’énorme avantage d’être pilotables. C’est-à-dire que leur production est intermittente mais pas aléatoire.

Elle est même pilotable instantanément ou presque. Une centrale hydroélectrique peut être mise en service en quelques minutes. Elle peut passer en 3 à 4 minutes de l’arrêt de la centrale à sa pleine puissance. Le thermique et encore moins le nucléaire ne peuvent être mis en production avec une telle rapidité. C’est un atout essentiel pour assurer l’équilibre permanent entre la production et la consommation d’électricité sans quoi le réseau s’effondre.

La production électrique ne dépend pas, sur le moment, du vent et du soleil. La décision de produire est prise en fonction des besoins, mais les capacités de production dépendent bien de la météorologie. Et elle est défavorable avec peu de neige cet hiver, un printemps chaud et un déficit de pluie en été.

Conserver la ressource en prévision de l’hiver

En juin, le gestionnaire du réseau électrique français (RTE) annonçait «une production hydroélectrique historiquement faible». La production hydro-électrique est en recul de 23% au niveau national depuis le 1er janvier. L’été aura été très mauvais. Comparée à 2021, la production était en baisse de 35% en juillet et d’environ 40% depuis le début du mois d’août. Même s’il s’agit pour partie d’une stratégie délibérée visant à conserver la ressource hydroélectrique en prévision d’un hiver qui s’annonce difficile.

Le problème est sérieux. Dès le début de l’année, EDF relevait un «déficit de pluie compris entre 10% et 25 % en deçà des moyennes historiques dans les Alpes ou le Massif central». Au 18 août, les réservoirs des barrages étaient remplis à 63 %, soit 16 points en dessous de la moyenne. Dans les Alpes du Sud, c’est même 30 points en dessous de la moyenne. Dans les Alpes du Nord, le taux de remplissage est actuellement de 68% en moyenne, au lieu de 81% habituellement à cette période de l’année. Ce qui ne veut pas dire que des précipitations abondantes à l’automne ne permettront pas de remplir les barrages. Personne ne sait.

Le problème n’est d’ailleurs pas la quantité d’eau, mais la répartition des précipitations tout au long de l’année. «Si la plupart des scénarios parlent de réchauffement, le volume global de précipitations ne devrait pas beaucoup baisser. En revanche, elles pourraient s’accentuer l’hiver et se raréfier l’été», explique la Compagnie Nationale du Rhône (CNR). Ce qui complique la production. «Ce n’est pas parce que les barrages seront plus remplis l’hiver que nous pourrons plus produire. Nos centrales sont équipées pour gérer un certain débit. Pas plus», ajoute la CNR.

La rédaction