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Le rétablissement d’EDF se confirme


L’énergéticien public est encore loin d’être totalement sorti des difficultés économiques et techniques qu’il accumule depuis plusieurs années, mais il prouve sa capacité de rebond et a renoué avec les bénéfices au premier semestre de cette année. De quoi lui permettre de se projeter et de se doter des moyens humains et financiers indispensables pour être le fer de lance de la transition énergétique du pays.

Après son naufrage en 2022, l’énergéticien public français retrouve un équilibre économique plus satisfaisant et confirme être entré en convalescence. Il faut dire qu’il n’a pas été épargné depuis de nombreuses années, par ses errements et ses erreurs et par des politiques publiques incohérentes voire aberrantes. L’an dernier a ainsi été une litanie de difficultés et de contraintes nouvelles : la crise de la corrosion affectant une partie du parc nucléaire et en conséquence un effondrement de la production électrique, la sécheresse pénalisant fortement la production hydroélectrique et pour finir le gouvernement français forçant l’entreprise publique à prendre à sa charge une partie du bouclier tarifaire pour protéger ménages et entreprises d’une hausse massive des prix de l’électricité. Tout cela s’était traduit en 2022 par une perte historique de 17,9 milliards d’euros…

EDF exporte à nouveau de l’électricité depuis le début de l’année

Et pour la première fois depuis plus de 40 ans, la France, traditionnellement toujours sur le podium des principaux exportateurs mondiaux d’électricité, s’était trouvée contrainte d’acheter de l’électricité provenant des centrales à charbon allemande… Beaucoup de commentateurs et d’experts ont alors mis en doute la capacité d’EDF à financer les (lourds) investissements à venir, sa stratégie de gestion de son parc nucléaire et l’affaiblissement de ses capacités techniques. Mais il faut être capable aussi de faire la part des choses entre les origines structurelles des pertes et des problèmes rencontrés, internes et externes (l’Etat actionnaire), et leurs origines conjoncturelles bien réelles. Et c’est bien ce qui se confirme, mois après mois.

Ainsi, après avoir réussi à réparer la majorité des réacteurs touchés par le phénomène de corrosion sous contrainte dans un temps record, la production a retrouvé des niveaux certes inférieurs à la moyenne des années précédentes mais largement au-dessus de ceux de 2022. Cette différence – combinée à une baisse de la demande qui subsiste – a ainsi permis au pays de redevenir exportateur d’électricité dès les tous premiers mois de l’année.

Un bénéfice net de 5,8 milliards d’euros au premier semestre

Mais c’est du côté financier que le redressement est le plus spectaculaire. EDF vient ainsi d’annoncer ses résultats semestriels. Le chiffre d’affaires est en augmentation de plus de 14%, et surtout le résultat net revient dans le vert à un niveau encore jamais atteint sur un semestre : 5,8 milliards d’euros.

Le producteur national a pu compter sur des marchés de l’électricité en Europe pas totalement remis de la crise et qui restent à des prix élevés pour augmenter ses marges. Un redressement qui arrive au meilleur moment. En plus de permettre d’effacer une partie des pertes de 2022, ces résultats sont surtout de nature à rassurer les marchés et l’industrie, au moment où EDF va devoir financer les considérables investissements à venir pour prolonger la vie de son parc nucléaire existant, développer et moderniser les centrales hydroélectriques, contribuer au développement des capacités renouvelables et lancer le nouveau programme de construction de réacteurs nucléaires.

Pour autant, le redressement d’EDF, financier et humain, est à peine commencé. Le groupe reste handicapé par une dette qui frôle les 65 milliards d’euros et fait face à un véritable mur d’investissements. Il doit aussi être capable dans les prochaines années de recruter des dizaines de milliers de techniciens et d’ingénieurs. L’énergéticien devra enfin tenir ses prévisions en terme de remontée en puissance de son parc nucléaire, afin de compenser la baisse progressive et prévisible des prix sur les marchés de l’électricité et pouvoir se désendetter tout en finançant, au moins en partie, les investissements à venir.

Philippe Thomazo

La rédaction