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Nucléaire: EDF va ouvrir une haute école de soudure


Il est vital pour la filière nucléaire française de retrouver les compétences et les savoir-faire qu’elle a perdu depuis trois décennies, par négligence et par aveuglement politique et économique. Former des soudeurs de haut niveau est une priorité. EDF avec de nombreux partenaires va ouvrir dans les prochains jours une haute école de soudure dans le Cotentin qui devrait à terme former des promotions annuelles de 200 soudeurs et soudeuses.

Le principal problème aujourd’hui de l’industrie nucléaire française est la perte de compétence des équipes de construction et de maintenance. Par négligence et par aveuglement politique et économique, le savoir-faire acquis lors de la construction dans les années 1970 et 1980 avec la construction du parc actuel de réacteurs nucléaires a été en partie perdu par le non remplacement des personnels qualifiés et plus encore la non transmission à une nouvelle génération de l’expérience acquise.

Cela explique en grande partie les errements, le mot est faible, du chantier de l’EPR de Flamanville et les problèmes de maintenance actuels d’une partie du parc de réacteurs. Parmi les incidents majeurs qui ont marqué la construction de l’EPR de Flamanville, il y a celui des soudures de qualité très médiocre d’un certain nombre de canalisations essentielles qu’il a fallu refaire. Cela est lié au fait que la France manque cruellement de soudeurs de haut niveau.

Ne plus reproduire les erreurs de Flamanville

A Flamanville, le problème portait sur pas moins de 60 soudures majeures notamment les huit des tuyauteries principales d’évacuation de la vapeur du réacteur vers les turbines. Certaines d’entre elles comporteraient des bulles d’air. Les huit soudures les plus problématiques se trouvaient au niveau de l’enceinte de confinement qui recouvre le réacteur et doit servir d’ultime protection en cas d’incident pour éviter qu’il rejette de la radioactivité dans l’atmosphère. Évacuer la vapeur sous pression au travers de l’enceinte de confinement via ce que les techniciens appellent les traversées est essentiel. Et la solidité de ces tuyauteries d’évacuation est un élément majeur du plan de sûreté du réacteur

Il est difficile aujourd’hui d’imaginer relancer un programme d’ampleur de constructions de réacteurs sans s’assurer de la compétence des équipes et notamment des soudeurs. EDF va donc ouvrir dans les prochains jours dans le Cotentin une haute école de soudure afin de former des soudeurs et soudeuses de haut vol, capables d’intervenir dans les environnements très contraints du nucléaire et également du naval.

Promis par Jean-Bernard Levy, le Pdg d’EDF, après la publication du rapport de Jean-Martin Folz sur les raisons de l’accumulation d’erreurs sur le chantier de l’EPR de Flamanville, l’école baptisée Hefaïs, en référence à Hefaïstos, dieu de la forge dans la mythologie grecque,

est né d’une alliance inédite entre EDF, Orano, Naval Group et les Constructions Métallurgiques de Normandie (CMN) appuyés par l’Union de l’industrie et des métiers de la métallurgie (UIMM), l’Etat (dans le cadre du Programme des Investissements d’Avenir) et la Région Normandie. L’investissement est de 12 millions d’euros et l’ambition d’Hefaïs est de former «les meilleures soudeuses et soudeurs de France».

Des besoins considérables dans l’industrie nucléaire mais aussi navale

«Il existe un gap important entre le soudeur qui opère dans un environnement conventionnel  et celui qui intervient dans ces environnements où il faut à la fois maitriser le geste technique, mais aussi des process industriels et documentaires très pointus», explique Corentin Lelièvre, directeur d’Hefaïs. L’école permettra ainsi à ses élèves de se former sur des maquettes industrielles à échelle 1. Elles reproduiront à l’identique le ballast d’un navire, la cellule d’une centrale nucléaire ou encore les zones contrôlées des sites d’Orano.

Hefaïs accueillera dans un premier temps des salariés d’entreprises sous-traitantes avant de s’ouvrir l’an prochain à des débutants, «demandeurs d’emploi et personnes en reconversion». Compte tenu des besoins considérables, l’objectif est d’arriver rapidement à des promotions annuelles d’environ 200 élèves venant de toute la France.

La relance du programme de construction de réacteurs nucléaires devrait se traduire rapidement par le démarrage d’au moins deux chantiers, ceux des deux EPR de Penly en Seine-Maritime. Et pour donner un ordre d’idée des besoins en matière de soudures, la construction d’un seul EPR nécessite 316.000 soudures faites sur un réseau de 130 kilomètres de tuyauteries. Et certaines de ses tuyauteries ne peuvent pas présenter la moindre faiblesse.

Et on peut ajouter à ses besoins, la nécessité de refaire rapidement des tuyauteries endommagées par la corrosion sur une partie du parc actuel de centrales.

 

 

 

 

 

La rédaction