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Barils de pétrole wikimedia commons

L’invasion de l’Ukraine par la Russie fait flamber les prix du pétrole et du gaz


L’invasion de l’Ukraine par l’armée russe a provoqué un vent de panique sur les marchés de l’énergie. Le baril de pétrole est monté jusqu’à 105 dollars, ce qui ne lui était plus arrivé depuis 8 ans et le gaz naturel a enregistré une envolée spectaculaire de 40% avant de refluer. La Russie est le deuxième producteur mondial de pétrole et de gaz. Une baisse de ses exportations, volontaire ou à la suite des opérations militaires et des sanctions, ne pourra être compensée rapidement par d’autres producteurs.

Sans réelle surprise, les cours du pétrole et du gaz se sont enflammés  jeudi 24 février après l’attaque massive lancée par l’armée russe contre l’Ukraine. Le baril de pétrole de qualité WTI est passé au-dessus du seuil des 100 dollars et celui de qualité Brent a dépassé 105 dollars une hausse de 8%,, ce qui ne lui était plus arrivé depuis 2014. Les cours du pétrole ont progressé de 20 dollars depuis le début de l’année. Et cela ne pourrait être qu’un début. De nombreux analystes estiment que le baril pourrait atteindre rapidement 120 dollars. Ce qui n’a d’ailleurs pas empêché les cours du pétrole de refluer en fin de journée quand le président américain Joe Biden a annoncé que les Etats-Unis et d’autres pays allaient mettre sur le marché une partie de leurs réserves stratégiques de pétrole. Le baril de Brent est alors revenu à 99 dollars en clôture et le WTI a fini la séance aux Etats-Unis à moins de 93 dollars.

Pour ce qui est du gaz, sur le marché de référence en Europe, le TTF (Title Transfer Facility) néerlandais se négociait à 114,50 euros le mégawattheure (MWh) en fin de journée après avoir culminé à 143,00 euros. Le prix du gaz naturel a ainsi gagné jusqu’à 40% en cours de séance…

L’Europe importe 46,8% de son gaz de Russie

La Russie est le deuxième producteur mondial de pétrole et de gaz et les marchés anticipent, du fait des opérations militaires et des sanctions, une baisse sensible de ses exportations d’énergie. Et compte tenu du poids de la Russie sur les marchés pétroliers et gaziers, les autres producteurs ne pourront pas compenser une grande partie des exportations russes manquantes.

L’Europe importe aujourd’hui environ 2,5 millions de barils de pétrole de Russie par jour et les Etats-Unis quelque 700.000 barils. Une solution pourrait être trouvée en réintégrant l’Iran dans le marché mondial et en accélérant les négociations sur le nucléaire avec la République islamique… alliée de Moscou. Mais l’Iran ne pourrait pas apporter plus de 1,2 à 1,3 million de barils supplémentaires par jour. «Les pays de l’Union européenne les plus vulnérables sont l’Allemagne, les Pays-Bas et la Pologne. Ils représentent 48% de toutes les exportations de pétrole brut en provenance de Russie», détaille la Saxo Bank dans une analyse.

Les marges de manœuvre sont encore plus limitées avec le gaz naturel dont la Russie est le premier exportateur mondial. L’Europe importe 46,8% de ses besoins en gaz depuis la Russie selon les chiffres d’Eurostat. La dépendance est variable selon les pays: la Lettonie se fournit ainsi exclusivement (100%) en Russie, la Finlande (98%) également. D’autres pays importent majoritairement du gaz russe. C’est le cas de l’Allemagne (66%) et de la Pologne (55%). En France, moins de 20% du gaz importé provient de Russie. L’Europe importe également du gaz de Norvège (20,5%), d’Algérie (11,6%). Elle en achète aussi aux États-Unis (6,3%) et au Qatar (4,3%) sous forme de GNL (Gaz Naturel Liquéfié).

«Assez de stocks pour passer l’hiver»

La situation ne devrait pas devenir ingérable immédiatement, même si les trois gazoducs traversant l’Ukraine sont fermés, car l’Europe a «assez de stocks pour passer l’hiver», a assuré le secrétaire d’État français aux Affaires européennes Clément Beaune. Les choses pourraient devenir compliqué ensuite notamment pour les pays très dépendants du gaz russe et qui se trouvent déjà dans une position délicate puisque Moscou a diminué depuis des mois ses fournitures de gaz à l’Europe.

Ainsi, les réserves de gaz allemandes sont tombées au début du mois de février à 35-36%. En réponse, les Etats-Unis et les Européens cherchent dans l’urgence des alternatives aux livraisons de  gaz russe. Pour la première fois en janvier, les livraisons d’urgence américaines de GNL ont été cinq fois supérieures en quantité aux livraisons russes par gazoducs.

S’exprimant à Paris jeudi 24 février  lors du forum de la Fédération nationale des travaux publics (FNTP), le président du groupe pétrolier TotalEnergies, Patrick Pouyanné, a prévenu: «si le gaz russe ne vient pas en Europe, on a un vrai sujet de prix du gaz en Europe», a-t-il déclaré. Autrement dit, l’Europe n’a actuellement aucune solution de remplacement si les importations de gaz venues de Russie devaient cesser.

La rédaction