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La France pourrait connaitre des pénuries de courant au début de l’année prochaine


Selon RTE, le gestionnaire du réseau électrique français, en cas de vague de froid au début de l’année prochaine, le pays pourrait connaître des coupures de courant, faute d’une production suffisante. La conséquence de retards de maintenance des centrales nucléaires, de décisions politiques irréfléchies comme la fermeture de la centrale de Fessenheim et d’une planification défaillante par EDF comme par l’Etat.

Les mêmes causes produisant les mêmes effets, la faiblesse répétée de la production électrique française pourrait créer des problèmes de pénurie et de coupures dans les prochains mois. Tout comme l’an dernier et sans doute jusqu’en 2025. Cette situation périlleuse est liée à la maintenance décalée des centrales nucléaires, à la fermeture définitive des deux réacteurs de Fessenheim l’an dernier et à une production faible pendant l’hiver des renouvelables solaire et éolien. Du coup, RTE (gestionnaire du réseau de transport d’électricité) a averti au début de la semaine, et comme l’an dernier, qu’il pourrait y avoir de sérieux problèmes d’approvisionnement, surtout si l’hiver est rigoureux.

Tout dépendra de la météorologie hivernale

La sécurité d’alimentation électrique «reste sous vigilance particulière, notamment en janvier et février en cas de vague de froid et de conditions défavorables sur le parc de production».

RTE a présenté au passage «un nouveau dispositif d’information dynamique permettant de préciser progressivement tout au long de l’hiver 2021-2022 le niveau de sécurité d’approvisionnement en électricité». Trois paramètres sont pris en compte: les conditions de température qui affectent le niveau de consommation, les conditions de vent et la disponibilité du parc nucléaire.

Le gestionnaire de réseau précise qu’ «aucune difficulté n’est toutefois à prévoir si les conditions météorologiques (température et vent) restent normales pour la saison».

Des risques jusqu’en 2025

La consommation annuelle d’électricité en France métropolitaine devrait être «d’environ 468 TWh sur l’année» (contre 458 TWh en 2020). En cas de vague de froid, chaque degré perdu entraîne une appel de puissance supplémentaire des consommateurs «d’en moyenne 2,4 GW».

Des réaménagements du calendrier des arrêts de tranches nucléaires ont été annoncés par EDF afin de limiter les risques pour la sécurité d’alimentation pour l’hiver 2021-2022: «deux arrêts devant se terminer en décembre 2021 ou janvier 2022 ont été repoussés après le cœur de l’hiver; cinq arrêts, débutant en janvier et février, voire en mars, ont été décalés d’une à deux semaines».

RTE estimait déjà dans un rapport sur les perspectives des dix prochaines années publié en mars dernier, que le risque de pénurie est important au moins jusqu’en 2025. Et sans doute au-delà. En tout cas, au cours des trois prochains hivers, les «marges seront très faibles». Cela signifie que la France pourrait connaître des coupures et des pénuries d’électricité. Ce que France Stratégie écrivait au début de l’année mais cette fois à l’échelle de l’Europe en ajoutant que la situation ne pouvait qu’empirer d’ici 2030. En novembre 2020, RTE avait déjà prévenu que l’hiver 2020-2021 pourrait être difficile. Finalement, il s’est bien passé, grâce à une météo plutôt clémente et surtout grâce… à la pandémie qui a pesé sur l’activité économique et la demande en énergie.

Mais la pandémie a eu d’autres conséquences plus problématiques même si elle offre un prétexte commode. Elle aurait totalement chamboulé et retardé de plusieurs années le calendrier apparemment très serré de maintenance des centrales nucléaires et donc de leur niveau de production. D’ici à 2025, pas moins de 21 réacteurs sur les 56 en service doivent passer la visite décennale. Cette inspection nécessite l’arrêt complet du réacteur. Elle est indispensable pour permettre de poursuivre leur activité. Comme l’explique RTE, certaines opérations de maintenance peuvent durer plus longtemps que prévu. L’an dernier, par exemple, le réacteur Bugey 2 (Ain) a été stoppé plus d’un an au lieu de six mois. Il est facile d’imaginer que la multiplication de retards de redémarrage de réacteurs pourrait réduire fortement la capacité de production.

Fermeture précipitée de Fessenheim et retards  répétés de Flamanville

Il faut évidemment ajouter à cela les retards répétés de l’entrée en service du nouveau réacteur nucléaire de dernière génération (EPR) de Flamanville. Il devrait commencer à produire au mieux en 2023… rien n’est moins sûr. RTE ne prévoit pas de toute façon son fonctionnement à pleine puissance avant le printemps 2025.

Il faudra aussi attendre 2025, au mieux, avant que les champs d’éoliennes marines commencent à produire significativement et de toute façon de manière intermittente. L’arrêt définitif l’an dernier des deux réacteurs de la centrale nucléaire de Fessenheim, pour des raisons purement politiques, n’a évidemment rien arrangé.

Conséquence de décisions politiques irresponsables et des défauts répétés de planification d’EDF comme du gouvernement, la situation est potentiellement périlleuse. «Le cumul de configurations défavorables ne peut être exclu, et il conduirait à un déficit de capacité de production à cet horizon [2025]», prévient RTE.

La rédaction