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Embouteillage Miami Wikimedia commons

Les embouteillages, un fléau environnemental, économique, social et de santé publique


Les embouteillages sont une calamité pour l’environnement, pour l’économie, pour les inégalités sociales et pour la santé publique. Qui s’en soucie? TomTom vient de rendre public son classement de 2022 des villes les plus embouteillées. Sans surprise, Paris demeure la commune où il est le plus pénible de circuler en France devant Bordeaux, Lyon, Nice, Marseille, Rouen… Les personnes qui circulent dans les rues parisiennes auront ainsi passé l’an dernier en moyenne 246 heures de leur vie dans les embouteillages ce qui représente plus de 30 jours de travail…

Les embouteillages sont une calamité. Pour l’environnement, en augmentant considérablement la pollution atmosphérique, la consommation de carburants et donc les émissions de gaz à effet de serre. Pour l’économie, en gaspillant des dizaines de milliards d’euros en heures perdues par des millions de personnes. Enfin en termes d’inégalités sociales qu’ils creusent et de santé publique en affectant les personnes qui les subissent. Et pourtant, les pouvoirs publics, notamment dans les grandes villes et métropoles et dans les régions ne font presque rien pour les limiter. A Paris, Anne Hidalgo en a même fait son arme de prédilection pour chasser les automobilistes de la capitale…

Du coup et sans surprise, Paris est restée de loin en 2022 la ville de France où il est le plus difficile de circuler selon le classement établi depuis des années à partir des données qu’il recueille par le développeur de systèmes de navigation TomTom. Cet index utilise les données de 389 villes dans le monde dans 56 pays et sur 6 continents. Il prend en compte le temps passé pour se déplacer, le coût des carburants et les émissions de CO2.

Plus de 30 journées de travail passées dans les embouteillages à Paris

Avec 246 heures passées en moyenne par les malheureux automobilistes (ce qui correspond à plus de 30 journée de travail), Paris est aussi l’une des villes européennes et au monde les plus encombrées. Et cela a coûté cher aux malheureux conducteurs. «Le coût des embouteillages pour le portefeuille des conducteurs est assez significatif. A Paris, conduire une voiture à moteur à essence dans les périodes de pointe augmente le coût de l’utilisation du véhicule de 40% par rapport à l’utiliser dans les périodes où la circulation est la plus faible», écrit TomTom.

Avec 32 minutes pour parcourir 10 km aux heures de pointe et une vitesse moyenne de 19 km/h, Paris est ainsi la cinquième des villes les plus embouteillées d’Europe. Londres conserve la «palme» avec plus de 42 minutes pour effectuer un trajet similaire. Bucarest (36 min), Dublin (36 min) et Milan (34 min) suivent. À l’opposé, les habitants de Gand, en Belgique, ne mettent que 13 minutes pour parcourir 10 km aux heures de pointe. A l’échelle mondiale, Paris est la onzième ville la plus embouteillée derrière Pune et Bengaluru en Inde, Lima au Pérou et Manille aux Philippines mais devant Mexico City ou Buenos Aires.

Pour son classement 2022, TomTom a changé sa méthodologie en prenant en compte de façon plus réaliste avec les parcours effectués deux zones pour chaque ville, à savoir son agglomération et son centre. Son index est calculé sur la base d’un trajet de 10 km effectué deux fois par jour aux heures de pointe. Et cela s’est traduit par quelques changements dans le classement et dans les estimations des heures passées et perdues derrière le volant.

Marseille voit sa situation relative s’améliorer avec 168 heures passées dans les bouchons et se fait «dépasser» par Bordeaux et Lyon, ravec espectivement 218 heures et 201 heures. Nice (165 heures), Nantes (164 heures) et Rouen (154 heures) figurent aussi parmi les villes les plus pénibles pour les conducteurs.

17 milliards d’euros gaspillés sur l’année

Toujours selon TomTom, effectuer un trajet de 10 km aux heures les plus chargées à Paris demande entre 30 minutes (matin) et 34 minutes (soir), contre 26 minutes en moyenne sur l’année. À Bordeaux, la différence peut aller jusqu’à près de 7 minutes pour un même trajet entre sa durée moyenne et l’heure de pointe du soir. À Nice, elle est d’à peine plus de 2 minutes entre la durée moyenne et l’heure de pointe du matin.

Selon TomTom, les automobilistes qui effectuent 10.000 km par an dans les 10 villes françaises les plus embouteillées dépensent entre 1.200 et 1.600 euros de carburant environ. Compte tenu de l’envolée des prix des carburants l’an dernier, cela s’est traduit pour TomTom par une forte augmentation de cette dépense, d’environ 16% pour l’essence et de 28% pour le gazole. «En télétravaillant un jour par semaine, un automobiliste parisien économiserait 166 euros», indique Tom-Tom.

Mais les Français s’en sortent bien. «Les conducteurs ont dépensé en moyenne dans le monde 27% de plus pour remplir leurs réservoirs d’essence qu’en 2021 et 48% de plus avec un véhicule diesel», souligne TomTom.

A l’échelle macroéconomique, les heures perdues dans les embouteillages représentent un coût extravagant. Il est estimé pour la France à 17 milliards d’euros par an, 1.943 euros pour chaque foyer se déplaçant en voiture… INRIX, une société spécialisée dans l’analyse du transport routier et de l’urbanisme, avait calculé il y a déjà une dizaine d’années l’impact économique des embouteillages en Angleterre, en France, en Allemagne et aux Etats-Unis. Elle avait pris en compte trois coûts différents: la baisse de productivité de l’économie, l’augmentation du coût des transports et des biens et le coût équivalent carbone de la pollution. En 2013, cela représentait 200 milliards de dollars dans les quatre pays étudiés. Et deux-tiers de ces coûts étaient liés au gaspillage de temps et de carburant.

Un marqueur des inégalités sociales

TomTom avait réalisé pour sa part il y a quelques années une étude montrant que les embouteillages accroissent considérablement les inégalités sociales. Plus la vie coûte cher dans une ville, plus les populations les moins favorisées ont tendance à aller s’installer dans les banlieues et les zones périurbaines où le coût des logements et le coût de la vie sont plus faibles. Mais elles continuent souvent à venir au centre des villes pour travailler, pour rencontrer des clients, pour intervenir sur des chantiers…

«La déconnexion entre le lieu de résidence et le lieu de travail» joue un rôle important dans les problèmes d’embouteillage des villes…», écrivait TomTom. Les embouteillages sont ainsi liés directement aux inégalités sociales et affectent plus particulièrement les catégories de population repoussées à l’extérieur des villes pour des raisons économiques.

La rédaction