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L’avenir est aux petits réacteurs nucléaires modulaires, moins complexes, moins coûteux, plus sûrs


Plus d’une cinquantaine de projets de mini réacteur nucléaires modulables sont aujourd’hui en cours de développement dans le monde notamment aux Etats-Unis, au Royaume-Uni, en Russie et en Chine. Même la France, longtemps réticente, semble suivre le mouvement. Il faut dire que ces petits réacteurs offrent une solution moins coûteuse, plus sûre et plus rapide à mettre en œuvre que les grandes centrales nucléaires pour produire de l’électricité décarbonée.

Si l’énergie nucléaire fait partie pour de nombreux organismes et institutions, allant du GIEC à l’Agence internationale de l’énergie (AIE), des outils indispensables à la lutte contre les émissions de gaz à effet de serre, son avenir ne se résume pas forcément aux grandes et puissantes centrales. Elles sont très complexes et difficiles à construire et à financer. Elles sont aussi associées aux catastrophes et accidents de Tchernobyl, Fukushima et Three Mile Island.

Les petits réacteurs modulaires, ou SMR, qui font l’objet de nombreux développements, notamment aux Etats-Unis, au Royaume-Uni, en Russie, au Canada, et en Chine, pourraient offrir une solution moins coûteuse, plus sûre et plus rapide à mettre en œuvre pour produire de l’électricité décarbonée.

Fabriqués en série et assemblés sur place

«Nous ne pouvons nous permettre le luxe d’exclure le nucléaire des outils dont nous disposons», résume Fatih Birol, le directeur exécutif de l’AIE. Pour réduire les émissions et réussir la transition, la part de l’électricité dans le mix énergétique mondial doit passer de 20 à 40% minimum d’ici 2050. Les renouvelables, notamment éoliens et solaires, n’y suffiront pas d’autant plus qu’ils sont par nature intermittents et aléatoires et nécessitent l’utilisation de très grandes surfaces et d’une grande quantité de matériaux et de matières premières. Pour atteindre les objectifs climatiques, il faut que la production d’électricité bas carbone dans le monde triple d’ici 2040. Comme l’expliquent Fatih Birol et Rafael Mariano Grossi, son homologue de l’Agence international de l’énergie atomique (AIEA): «cela revient à ajouter l’ensemble du système électrique du Japon au réseau mondial chaque année. Il est très difficile de voir comment cela peut se faire sans une contribution majeure de l’électricité nucléaire».

Fatih Birol et Rafael Mariano Grossi, appellent ainsi les gouvernements à investir dans la prolongation des centrales nucléaires existantes, à construire de nouvelles centrales et à investir dans l’innovation, notamment les petits réacteurs modulaires ou SMR (small modulaire reactor).

De 50 à 300 MW, contre 900 à 1.600 MW pour une tranche nucléaire classique, les mini-réacteurs peuvent être fabriqués en série et en usine de façon modulaire, puis assemblés sur place. Ils nécessitent des investissements relativement réduits et sont plus faciles à intégrer dans les réseaux électriques, notamment là où ils présentent des faiblesses. Ils peuvent aussi servir spécifiquement à produire des carburants de synthèse et de l’hydrogène vert nécessaires à la transition dans les transports lourds et l’industrie.

La France en retard

La France commence enfin à s’intéresser aux SMR dont EDF, très attaché à ses cathédrales nucléaires, n’a pendant longtemps pas voulu entendre parler. Il existe pourtant le projet Nuward acronyme de NUclear forWARD («en avant le nucléaire») sur lequel travaille depuis plusieurs années un consortium réunissant EDF, le CEA, TechnicAtome et Naval Group. Il fournirait une puissance de l’ordre de 300 MW. Framatome s’est par ailleurs associé aux Etats-Unis avec General Atomics Electromagnetic Systems (GA-EMS) pour concevoir un mini réacteur de 50 mégawatts refroidi à l’hélium. Il sera fabriqué en usine, puis assemblé sur site. Le combustible fonctionnera pendant environ neuf ans avant d’être remplacé. La conception pourrait être finalisée d’ici à 2030 pour une utilisation commerciale au milieu des années 2030, espère GA-EMS. Enfin, une partie des 472 millions d’euros consacrés à la filière nucléaire dans le plan de relance du gouvernement pourraient servir au développement d’un SMR.

Mais on reste très loin des projets existants au Royaume-Uni par exemple, qui devrait investir au moins 2 milliards de livrespour la construction de 16 SMR d’ici à 2050. Outre la centrale nucléaire flottante du russe Rosatom amarrée en Sibérie orientale, plus d’une cinquantaine de projets de SMR sont aujourd’hui en développement dans le monde, selon l’AIEA. Et quatre sont en cours de fabrication en Argentine, en Chine et en Russie.

L’un des concepts jugés les plus avancés est celui de l’américain NuScale (voir l’image ci-dessus). Il projette de mettre en production en 2027 des modules de 66 à 77 mégawatts permettant en les combinant de fabriquer des centrales d’une puissance adaptée directement aux besoins locaux. Sa solution a été validée en terme de sécurité par la Nuclear Regulatory Commission américaine.

La rédaction