Transitions & Energies

Voitures électriques et bornes de recharge, loin du compte


L’association de consommateurs UFC-Que Choisir dénonce à la fois le retard de déploiement des réseaux de bornes de recharge de véhicules électriques en France, qui crée de fait des « zones blanches » sur le territoire, et quand les bornes existent des prix de recharge qui n’ont aucun sens. Cela explique, en partie, pourquoi la voiture électrique est toujours aussi impopulaire en France en dépit de campagnes incessantes faisant sa promotion. C’est ce que montre le dernier sondage sur la question réalisé par BVA pour le compte d’AutoJM, un mandataire automobile. Seulement 18% des personnes interrogées trouvent le véhicule électrique « intéressant ».

L’association de consommateurs UFC-Que Choisir vient de publier le 27 novembre une étude sur les bornes de recharge pour voiture électrique. Les pouvoirs publics s’étaient félicités d’avoir atteint, avec trois ans de retard, le cap des 100.000 bornes de recharge publiques en  France métropolitaine, publiques signifiant accessibles au public, de l’autosatisfaction vraiment prématurée. Car UFC-Que choisir dénonce le retard de déploiement du réseau de bornes, surtout celles à charges rapides, et craint l’apparition durables de « zones blanches » dans le pays et souligne également « des prix de recharge répondant à des critères opaques, voire abracadabrantesques ».

L’UFC-Que choisir pointe dans son étude « le décalage entre la promotion gouvernementale des véhicules et la lenteur du déploiement du réseau de bornes ». L’objectif était de 100.000 points de recharge publics déployés en 2020, un seuil qui a été atteint en mai 2023… La faute à la pandémie de Covid ! Si « une accélération du déploiement a récemment été constatée », l’UFC-Que choisir doute sérieusement du déploiement annoncé de 400.000 points de recharge en 2030.

Elle craint ainsi « la persistance de « zones blanches » de la recharge publique ». L’explication est simple : « l’absence d’une stratégie globale d’implantation sur le territoire ». L’association alerte du coup sur le risque grandissant, si la disponibilité des bornes de recharges ne s’améliore pas rapidement, d’engorgements de véhicules devant les bornes. D’autant qu’il y a en outre de sérieux problèmes de disponibilités. Ainsi, « 39% des bornes de recharge rapides ne fonctionnent pas en permanence ».

Des écarts de prix délirants

Et puis il y a la question de la tarification de la recharge. L’UFC-Que choisir regrette notamment « l’absence de règles assurant aux consommateurs la possibilité de comparer les prix ». Ce qui conduit sans surprise à « des aberrations tarifaires ». « Certains opérateurs pratiquent une tarification à la quantité d’électricité consommée (kWh), d’autres y associent des frais fixes, d’autres encore des frais de stationnement ».

« Comment un consommateur peut-il savoir si le prix d’une recharge est plus intéressant en s’abonnant à un opérateur qui tarifie à 73% au kilowattheure (kWh) et 27% à la minute ou à un autre qui tarifie à 51% au kWh et 49% à la minute », s’interroge UFC-Que choisir.

L’association de consommateurs a fait un test de « recharge d’un véhicule sur un échantillon de bornes en ville, sur route et sur autoroute ». Résulatt, « sur une même borne, les écarts de prix peuvent être substantiels ». En fait, ils sont délirants et une différence de tarif de 830% a été constatée en ville avec un kWH dont le prix passait de « 0,39 à 2,12 euros selon l’opérateur ». Ainsi le coût de la recharge d’une Peugeot e-208 à Lyon sur une borne lente peut varier de « 7,35 euros à 68,77 euros selon l’opérateur ».

Un cadre réglementaire et concurrentiel

L’association demande donc « un cadre obligatoire de déploiement des bornes de recharge accessibles au public sur tout le territoire à destination de la mobilité quotidienne et de la mobilité longue distance ». Elle souhaite « un affichage obligatoire, harmonisé et accessible des tarifs de la recharge électrique pour l’ensemble des bornes publiques ». Enfin, UFC-Que Choisir demande un paiement direct par carte bancaire sur les bornes « pour ne pas contraindre les consommateurs à passer par un opérateur de recharge » et « l’ouverture des données sur l’ensemble des prix pratiqués sur toutes les bornes de recharge du territoire ».

La voiture électrique toujours impopulaire

Pas étonnant dans ses conditions que la voiture électrique reste en France très impopulaire. Et la publicité incessante, les subventions d’un côté et contraintes grandissantes de l’autre et les discours moralisateurs répétés à l’envie sur tous les médias n’y changent rien. Les Français ne sont toujours pas convaincus, en majorité, par les véhicules électriques. C’est ce que montre le dernier sondage sur la question réalisé par BVA pour le compte d’AutoJM, un mandataire automobile qui importe des véhicules neufs depuis 1975.

D’abord et sans surprise, les Français n’ont pas vraiment le moral. Ainsi, 65% d’entre eux estiment que le moment n’est pas propice à l’achat d’une voiture. Et plus significatif, 32% des Français ont renoncé à l’achat d’un véhicule cette année, tandis que seulement 15% envisagent d’en acheter une dans les 12 prochains mois.

Conséquence logique, 77% des automobilistes interrogés expriment leur souhait de conserver le plus longtemps possible leur véhicule actuel dont l’âge moyen de huit ans est plutôt élevé.

Tout cela concoure à renforcer la défiance à l’égard du véhicule électrique puisque seulement 18% des sondés le trouve intéressant. Si on rapporte ce nombre à celui qui envisagent réellement de changer de voiture, il passe à 38% qui disent tout de même considérer cette possibilité. De là à franchir le pas…

Changement de règles permanent

Et pourtant, la pression exercée par les pouvoirs publics à coups de contraintes et de malus ne cesse de grandir. Sachant que les Français ont sans surprise du mal à suivre le changement permanent des régles du fameux bonus-malus. Ils sont même 78% selon BVA à ne plus rien y comprendre et à s’en plaindre.

Seule certitude. En tout cas, à partir du 1er janvier prochain, un malus sera appliqué à tout véhicule émettant plus de 118 grammes de CO2/ par kilomètre. Le montant du malus est de 50 euros par gramme au-dessus de ce seuil jusqu’à un maximum de 60.000 euros. Acheter un véhicule neuf à moteur thermique devient du masochisme.

Et pour ce qui des nouvelles règles concernant pour le bonus, elles ne seront pas connues avant le 15 décembre. Actuellement, pour obtenir cette prime, il faut acquérir un véhicule électrique (ou hybride) de moins de 47.000 euros et d’un poids inférieur à 2,4 t. La nouvelle règle sera évidemment… plus compliquée. Pour décrocher une aide à l’achat d’une voiture 100% électrique de 5.000 à 7.000 euros selon le profil de l’acheteur, il faudra que le véhicule établisse un éco-score minimal de 60 points sur un total de 100… On comprend mieux pourquoi 32% des Français ont purement et simplement renoncé à leur projet d’achat automobile.

ZFE, un pas en avant, deux pas en arrière

Et puis il y a aussi les règles fluctuantes et incompréhensibles des fameuses zones à faibles émissions (ZFE). En interdisant tout simplement la circulation des véhicules les plus anciens dans les métropoles et les villes, elles sont conçues pour être une puissante incitation à changer de voiture. Cela fonctionne pour 41% des sondés, tandis que 51% expriment leur opposition à cette assignation à résidence en fonction des classes sociales et plus précisément sur la capacité financière des ménages à acquérir un véhicule récent…

Et les choses ne devraient pas s’arranger. Les véhicules électriques restent très chers et seuls les constructeurs chinois sont aujourd’hui capables, avec le soutien massif de leur gouvernement, d’en vendre à des tarifs relativement accessibles. C’est pourquoi dans l’étude BVA pas moins de 50% des pro-électriques se disent intéressés par des voitures chinoises.

Oui mais voilà, le nouvel éco-score est justement conçu comme une mesure protectionniste pour sauver les constructeurs européens et français en très mauvaise posture. Il ne prend pas seulement en compte l’usage du véhicule, mais aussi l’empreinte carbone lié à sa fabrication.

La rédaction