<i class='fa fa-lock' aria-hidden='true'></i> L’Allemagne n’a plus le choix et mise tout sur le GNL

2 décembre 2025

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L’Allemagne n’a plus le choix et mise tout sur le GNL

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Pour alimenter les 40 nouvelles centrales à gaz qu’elle a décidé de construire en urgence pour sécuriser son système électrique et remplacer les centrales à charbon, l’Allemagne va devoir importer des quantités toujours plus grandes de GNL (Gaz naturel liquéfié). Après avoir longtemps refusé d’investir dans des terminaux de GNL pour ne pas heurter alors son fournisseur de gaz russe… l’Allemagne rattrape rapidement son retard. Elle devrait devenir d’ici la fin de la décennie le quatrième importateur mondial de GNL derrière la Corée du Sud, la Chine et le Japon.

En contrepartie d’un investissement massif de plus de 600 milliards d’euros depuis une décennie dans les renouvelables intermittents (éolien, solaire) et de l’abandon dans le même temps du nucléaire, l’Allemagne se retrouve avec une envolée des prix de l’électricité et une dépendance toujours aussi grande à ses centrales extrêmement polluantes au charbon et au lignite quand il n’y a pas de vent et de soleil… Pendant des années les gouvernements allemands ont refusé d’admettre cette réalité, mais cela n’est plus possible aujourd’hui. Les ménages allemands payent leur électricité plus chère que partout ailleurs en Europe et les usines ferment une à une asphyxiées par les prix de l’énergie. Voilà pourquoi, le chancelier conservateur (CDU) Friedrich Merz a amorcé un changement majeur de politique énergétique.

Il se traduit par moins d’argent public pour les renouvelables, des subventions aux prix de l’électricité pour les entreprises afin d’enrayer la désindustrialisation du pays et par le choix du gaz, et plus particulièrement du GNL (Gaz naturel liquéfié), pour remplacer le charbon et assurer la stabilité du système électrique du pays. Berlin va ainsi construire dans l’urgence 40 centrales à gaz.

Cinq terminaux flottants de GNL

Et il faudra bien les alimenter. Il n’est évidemment plus question d’importer massivement le gaz russe par gazoducs. La stratégie d’Angela Merkel pour ancrer à l’ouest la Russie s’est effondrée en février 2022 avec l’invasion de l’Ukraine. La seule possibilité est donc d’acheter du gaz liquéfié aux Etats-Unis et au Qatar, ce qui n’est pas sans avoir quelques inconvénients.

D’abord, parce que l’Allemagne a longtemps refusé d’investir dans des terminaux de GNL pour ne pas heurter son partenaire et fournisseur de gaz russe… Mais elle rattrape rapidement son retard. Elle n’avait aucun terminal en 2022 et en a cinq équipés d’unités flottantes de stockage et de regazéification qui ne sont pas encore tous opérationnels. Mais d’ores et déjà, l’Allemagne a moins besoin d’importer du GNL d’autres pays européens et notamment de France. Ainsi, TotalEnergies a annoncé le 25 novembre la « démobilisation » de son terminal méthanier flottant installé dans le port du Havre. La France dispose encore de 4 terminaux méthaniers (Dunkerque, Montoir-de-Bretagne, Fos Cavaou, Fos Tonkin).

L’Allemagne en aura 5 qui lorsqu’ils seront pleinement opérationnels d’ici 2030, fourniront au plus grand consommateur de gaz de l’Union Européenne une capacité d’importation de 70,7 millions de tonnes de gaz liquéfié par an. L’Allemagne deviendra ainsi le quatrième importateur mondial de GNL derrière la Corée du Sud, la Chine et le Japon. Outre le GNL, l’Allemagne a aussi accès au gaz norvégien via le réseau de gazoducs du continent et, en théorie, au gaz acheminé par gazoduc depuis l’Azerbaïdjan via la Turquie et l’Italie.

Mais le GNL coûte cher et n’est pas, loin de là, une panacée pour réduire les émissions de gaz à effet de serre. Le modèle de la transition énergétique allemande tant vanté, l’Energiewende, a du plomb dans l’aile.

Des émissions catastrophiques pour le GNL

En tout cas, l’objectif de zéro émission nette s’éloigne quel que soit le nombre d’éoliennes et de panneaux solaires installés sur le sol allemand. Car leur production est par nature intermittente et aléatoire le pays a et aura toujours besoin de beaucoup de gaz. Et le GNL émet beaucoup de gaz à effet de serre… L’ironie de l’histoire est que selon certaines études scientifiques, publiées par différentes universités et institutions au cours des dernière années, en 20182020, 2022 et 2024, les émissions de gaz à effet de serre, sur l’ensemble du cycle de vie, du GNL sont catastrophiques. Cela serait lié notamment à des émissions massives de méthane, un gaz à effet de serre bien plus puissant que le CO2, bien avant la combustion finale du GNL. Une étude publiée en 2024 par la Cornell University affirme que l’impact sur le climat des émissions du GNL serait même parfois supérieur à celui du charbon…

Pour être honnête, l’Allemagne a réussi à tenir l’une des promesses faites en 2022 : réduire sa consommation de gaz. La consommation de gaz dans le pays n’a cessé de diminuer depuis trois ans. Mais ce n’est pas avant tout à la suite de progrès dans l’efficacité énergétique ou dans la substitution au gaz d’énergies dites alternatives. Non, la consommation de gaz a diminué parce que l’activité industrielle a baissé, et l’activité industrielle a baissé parce que le gaz disponible est trop cher pour maintenir la compétitivité des entreprises allemandes, tout comme l’électricité d’ailleurs. A tel point, que le gouvernement allemand vient de décider de subventionner l’électricité pour ses groupes industriels.

Pour en revenir au gaz et plus particulièrement au GNL, les prix resteront relativement élevés à moyen et long terme. Parce que le GNL s’est toujours négocié à un prix supérieur à celui du gaz acheminé par gazoduc du fait que sa production implique un processus beaucoup plus complexe. Et les cours spot du GNL sont étroitement dépendants du niveau de la demande en Asie (Corée du sud, Chine, Japon). Cela explique pourquoi l’Allemagne a rompu une autre promesse qu’elle avait faite après 2022 : ne plus jamais s’enchaîner à des contrats de livraison de gaz à long terme comme elle l’avait fait avec Gazprom et la Russie.

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La rédaction

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