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Patrick Pouyanné Pdg Total wikimedia commons

Total prend des mesures d’urgence pour faire face au krach pétrolier


Confronté à un effondrement des cours du baril, Total annonce d’importantes mesures d’économie portant sur 5 milliards de dollars. Elles concernent les investissements, les dépenses opérationnelles et l’arrêt du rachat d’actions.

Avec des cours du pétrole quasiment divisés par trois depuis janvier, l’industrie pétrolière s’apprête à vivre une année particulièrement difficile. Certes, il s’agit d’une activité cyclique par définition et qui a traversé dans son histoire des épisodes particulièrement mouvementés comme les contrechocs de 1986 et 1998 avec un baril à moins de 10 dollars. Mais le krach de 2020 est particulièrement douloureux parce qu’il s’agit à la fois d’un effondrement de la demande dans le monde lié aux conséquences économiques de la pandémie de coronavirus, et d’une forte et inattendue augmentation de l’offre du fait de la guerre des prix menée par l’Arabie Saoudite, le premier exportateur mondial.

Face à cette situation, «nous ne pouvons pas ne rien faire» a résumé Patrick Pouyanné (en photographie ci-dessus), le patron de Total, dans un message vidéo adressé le 19 mars aux salariés. A la suite, le groupe pétrolier a publié lundi 23 mars un communiqué annonçant un ensemble de mesures d’économie portant sur plus de 5 milliards de dollars. La compagnie pétrolière va d’abord réduire ses investissements de plus de 20% afin qu’ils soient inférieurs cette année à 15 milliards de dollars. Cela représente une économie de 3,3 milliards de dollars. Les activités d’exploration-production seront les plus touchées

La compagnie va également faire des économies opérationnelles de 800 millions de dollars au lieu de 300 millions prévus initialement. Cela passera notamment par le «gel immédiat» des recrutements sauf dans des secteurs jugés prioritaires comme les énergies nouvelles et le numérique.

Enfin, Total suspend son programme de rachat d’actions pour soutenir les cours. Il devait porter sur 2 milliards de dollars en 2020. Le groupe avait déjà utilisé 550 millions de dollars lors des deux premiers mois de l’année. Mais pour obtenir le soutien et la fidélité de ses actionnaires, Total ne prévoit pas pour le moment d’abaisser ses dividendes. Le cours de son action a été divisé par deux depuis le début de l’année

Une situation financière plus solide qu’en 2014

«Nous survivrons aux tempêtes de 2020… J’ai une grande confiance dans notre capacité à résister à cette crise» a affirmé Patrick Pouyanné. Si le baril s’échange en moyenne sur l’année autour de 30 dollars, l’impact de la chute des cours pourrait représentera «un trou de 9 milliards de dollars» dans les comptes du groupe pétrolier. Les mesures annoncées lundi par Total devraient donc permettre de combler un peu plus de 5 milliards de dollars. Le solde sera compensé par un recours accru à l’endettement, a indiqué Patrick Pouyanné. Reste à savoir si le prix du baril ne sera pas nettement inférieur sur l’ensemble de l’année puisqu’il est compris en ce moment entre 22 et 25 dollars.

En tout cas, comme l’a mis en avant le patron de Total, le groupe est dans une situation bien plus solide que lors de la précédente chute des cours du pétrole en 2014. Le point mort, le prix du baril qui permet à la société d’être rentable, a été divisé par quatre en six ans. Il est passé de 100 dollars à 25 dollars. Les coûts de production ont été réduits de moitié et représentent 5 dollars le baril. Enfin, le niveau d’endettement a fortement été abaissé. Maintenant, toute la question est de savoir quelle sera l’ampleur et la durée de la récession dans le monde et si la guerre des prix entre l’Arabie Saoudite et la Russie se prolonge pendant des mois ou des années. Dans un cas comme dans l’autre, Total ne peut que tenter de limiter les dégâts.

En attendant, les marchés boursiers semblaient rassurés dans un premier temps par les mesures annoncées. Le cours de l’action Total gagnait 10% mardi 24 mars en séance.

La rédaction