En dénonçant les non dits de l’économie verte, Michael Moore provoque la colère des écologistes

5 mai 2020

Temps de lecture : 3 minutes
Photo : Planet of the Humans Michael Moore
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En dénonçant les non dits de l’économie verte, Michael Moore provoque la colère des écologistes

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Le cinéaste et polémiste Michael Moore est un habitué de la provocation et de la caricature. Il vient de s’en prendre cette fois dans son dernier film, Planet of the Humans (La planète des humains), à la transition énergétique et à la façon dont elle est menée. Mais il est du coup accusé de trahison […]

Le cinéaste et polémiste Michael Moore est un habitué de la provocation et de la caricature. Il vient de s’en prendre cette fois dans son dernier film, Planet of the Humans (La planète des humains), à la transition énergétique et à la façon dont elle est menée. Mais il est du coup accusé de trahison par de nombreux écologistes.

Michael Moore, s’est attaqué, entre autres, dans sa carrière, à la violence meurtrière aux Etats-Unis (Bowling for Columbine), au système de santé américain (Sicko), à la guerre en Irak menée par George W. Bush (Fahrenheit 9/11), au cynisme de l’industrie automobile américaine (Roger and me)… Cela lui a valu notamment un Oscar du meilleur documentaire en 2003 pour Bowling for Columbine et une palme d’or au Festival de Cannes en 2004 pour Fahrenheit 9/11.

Le coût environnemental élevé des renouvelables et de la voiture électrique

Dans Planet of the Humans, il dénonce le coût environnemental des énergies renouvelables comme le solaire,  l’éolien, la biomasse et de la voiture électrique à batteries. Il dénonce les intérêts économiques et les entreprises qui font la promotion de ses technologies et «se moquent» de la transition énergétique. Le film est réalisé par Jeff Gibbs et Michael Moore en est le producteur exécutif. Il est mis en ligne gratuitement sur sa chaîne Youtube. On peut le voir ici.

Michael Moore a toujours fait dans l’outrance. Mais il a le mérite de rappeler que ses technologies, si elles sont indispensables, ne feront jamais à elles seules, la transition. Et qu’elles doivent impérativement améliorer leurs performances, être fabriquées dans des conditions plus acceptables et réduire leurs nuisances et leur empreinte environnementale souvent problématiques. Des réalités parfois dérangeantes pour ceux qui font la promotion de solutions miracles et faciles à la transition énergétique.

Greenwashing

Le documentaire est présenté à la première personne par Jeff Gibbs, qui est un collaborateur de longue date de Michael Moore. Ce dernier apparaît de temps à autre à l’écran. Militant écologiste depuis de nombreuses années, Jeff Gibbs raconte sa prise de conscience douloureuse que les énergies vertes, sans cesse mises en avant par les écologistes comme la solution au réchauffement climatique, peuvent parfois s’apparenter à «une tromperie». Car, par exemple, pour fabriquer, transporter et installer des éoliennes et des panneaux solaires, il n’est pas possible de s’affranchir, aujourd’hui, des énergies fossiles. Une découverte qui n’en est pas une…

Plus grave encore à ses yeux, les énergies vertes servent parfois à de grandes entreprises de façade et d’arguments de pure communication pour se construire une bonne image, le fameux greenwashing. Là encore, rien de bien nouveau. Mais cela prend une autre tonalité et une autre force quand c’est Michael Moore qui le «révèle», notamment au sein du mouvement écologiste américain qui dénonce une trahison. Au point que certains militants ont voulu censurer le film et empêcher et bannir sa projection en menant une véritable guerre sur les réseaux sociaux. Et ils y sont parvenus, car le distributeur initial du documentaire (Film For Actions) a abandonné. C’est la raison pour laquelle le film est maintenant accessible gratuitement en ligne.

Ce qui ne passe pas notamment est la critique acerbe de l’hypocrisie de célébrités qui ont fait de l’écologie un fonds de commerce médiatique et la remise en cause des voitures électriques. Le film souligne le fait que dans de nombreux pays, dont les Etats-Unis ou la Chine, l’électricité qui recharge les batteries est produite très majoritairement avec des énergies fossiles, du gaz ou du charbon. Il rappelle également le coût environnemental très élevé de la fabrication des batteries lithium-ion.

En résumé, Planet of the Humans montre que les énergies renouvelables ne sont pas aussi renouvelables que cela. Que derrière les discours en faveur de la transition énergétique, il y a souvent des intérêts économiques cachés. Et qu’il faut aborder plus sérieusement et plus radicalement la façon de changer nos modes de fabrication et d’utilisation de l’énergie pour réussir à se passer réellement des énergies fossiles. Il prône enfin clairement la réduction de la consommation d’énergie et la décroissance.

Accepter la complexité et la difficulté de la transition

Le documentaire est en lui-même finalement presque simpliste et ses arguments avant tout émotionnels, comme souvent avec Michael Moore. Il découvre qu’il n’y a pas de solutions miracles à la transition énergétique, que les énergies fossiles dominent le monde et assurent 80% de sa consommation énergétique et que de nombreux progrès technologiques sont encore à faire pour avoir des sources d’énergies réellement propres.

Les lecteurs de Transitions & Energies n’apprendront pas grand chose en voyant Planet of the Humans. Le plus remarquable dans ce film, ce sont finalement les réactions qu’il suscite. Cela montre que le refus d’accepter la complexité et la difficulté de la transition énergétique est sans doute le plus grand obstacle pour la mener à bien.

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