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Les trois scénarios de la transition selon l’étude BP Energy outlook 2022


La très attendue étude BP Energy outlook 2022 se penche sur les trois scénarios possibles de transition énergétique d’ici 2050. Dans le premier scénario prolongeant les tendances actuelles dit «New Momentum», les émissions mondiales de gaz à effet de serre atteignent un pic à la fin des années 2020 et sont en 2050 inférieures d’environ 20% à leur niveau de 2019. Les deux autres scénarios dits «Accelerated» et «Net Zero» permettent d’abaisser respectivement de près de 75% et près de 95% les émissions de gaz à effet de serre d’ici le milieu du siècle, toujours par rapport à 2019. Mais ces deux scénarios ne sont possibles qu’avec des baisses sensibles de la consommation d’énergie dans le monde ayant un impact à la fois sur l’activité économique et le niveau de vie des populations.

La compagnie pétrolière BP vient de publier sa très attendue étude Energy Outlook qui fait référence. La précédente remonte à 2020. L’étude de 2022 présente trois scénarios possibles d’évolution de la consommation énergétique mondiale d’ici à 2050. BP a tenu à préciser que l’étude a été réalisée avant l’invasion de l’Ukraine par la Russie et ne prend donc pas en compte d’éventuelles conséquences de cette guerre sur les marchés de l’énergie. Rappelons que la Russie est le deuxième producteur mondial de pétrole comme de gaz naturel. BP indique par ailleurs que les 3 scénarios développés n’ont pas vocation à être «des prédictions de ce qui pourrait arriver ou de ce que BP souhaite voir» mais des pistes indiquant de possibles évolutions.

Des stratégies loin d’être rationnelles et optimales

Même si les incertitudes sont considérables et ont d’ailleurs encore augmenté avec la guerre en Europe et les sanctions contre la Russie, les trois scénarios proposés par BP ont un certain nombre de points communs. Il s’agit en quelque sorte de constantes sur la façon dont les systèmes énergétiques dans le monde pourraient se transformer plus ou moins rapidement dans les prochaines décennies. Premier point général, les politiques énergétiques des pays et différentes organisations supranationales sont caractérisées par des décisions et des stratégies qui répondent à la fois à des considérations politiques, économiques, financières, sociales, idéologiques et géopolitiques. Cela signifie que d’un strict point de vue de l’efficacité énergétique et économique, elles sont loin d’être optimales et parfois même loin d’être rationnelles. En outre, elles sont faiblement ou pas du tout coordonnées y compris au sein d’entités supranationales politiques comme l’Union Européenne.

L’économiste en chef de BP, Spencer Dale, souligne en introduction de l’étude que si «les ambitions annoncées par les gouvernements dans le monde pour s’attaquer au changement climatique ont nettement augmenté, elles doivent encore se traduire par des actions correspondantes. En dehors de l’année 2020 marquée par la pandémie de Covid, les émissions de carbones ont augmenté tous les ans depuis 2015, l’année des accords de Paris».

Le BP Energy outook 2022 identifie quatre évolutions constantes

-La production d’électricité éolienne et solaire augmente rapidement soutenue par une électrification des usages de l’énergie dans le monde. La part de l’électricité dans la consommation finale d’énergie passe de près de 20% en 2020 à 30% en 2050 dans le scénario «New Momentum», le moins ambitieux, à près de 50% dans le scénario «Net Zero», le plus ambitieux. En tout, la consommation d’électricité augmente de 75% à 85% dans les trois scénarios.

-Un ensemble de sources d’énergies et de technologies sont nécessaires pour réussir une décarbonation profonde des systèmes énergétiques mondiaux, notamment le nucléaire, les véhicules électriques, l’hydrogène bleu (avec capture de CO2) et vert (produit sans carbone par électrolyse avec de l’électricité non fossile), les bioénergies et la capture du carbone.

-Le pétrole et le gaz naturel vont continuer à jouer un rôle essentiel pour des décennies, mais avec des volumes plus réduits au fur et à mesure que les sociétés réduiront leurs dépendances aux carburants fossiles.

-Le mix énergétique va devenir de plus en plus varié, avec plus de choix possibles pour les consommateurs et une demande accrue d’intégration de différentes sources d »énergie et services énergétiques.

Les trois scénarios possibles d’évolution du mix énergétique mondial

1) Un scénario qui prolonge les tendances actuelles dit «New Momentum». Dans celui-ci, les émissions mondiales de gaz à effet de serre atteignent un pic à la fin des années 2020 et sont en 2050 inférieures d’environ 20% à leur niveau de 2019

2) Un scénario dit «Accelerated» qui comme son nom l’indique est caractérisé par une accélération du rythme de réduction des émissions de gaz à effet de serre d’origine humaine qui diminuent de 75% d’ici 2050 par rapport à 2019.

3) Un scénario baptisé  «Net Zero» qui se traduit par une baisse drastique de 95% des émissions de gaz à effet de serre d’ici le milieu du siècle.

Emissions de CO2 selon les trois scénarios.

D’un scénario à l’autre, les différences majeures proviennent avant tout du rythme d’installation des équipements décarbonés (renouvelables, hydrogène, nucléaire, véhicules électriques…) et plus encore du volume de la consommation d’énergie dans le monde. C’est-à-dire de l’augmentation ou de la baisse de la consommation d’énergie à l’échelle planétaire par les pays développés et ceux en développement. Dans son scénario «New Momentum», BP estime que la consommation finale d’énergie dans le monde pourrait être, en 2050, supérieure de près de 15% au niveau de 2019. La compagnie envisage en revanche une baisse de 10 à 25% de cette consommation mondiale dans ses deux autres scénarios (avec un pic de la demande dès le début des années 2020 dans son scénario «Net Zero»).  Mais cette baisse de la consommation d’énergie a des conséquences économiques et sociales.

L’étude souligne que même si les «les améliorations de l’efficacité énergétique et le passage à des énergies décarbonées se produisent à des taux historiquement sans précédent, atteindre le niveau d’émissions de CO2 cumulées du scénario le plus ambitieux (Net Zero) ne serait probablement possible que si l’énergie finale consommée au cours de cette période est nettement inférieure». En clair, que ce soit le scénario «Accelerated» ou plus encore «Net Zero», ils nécessitent une baisse sensible de la consommation d’énergie dans le monde via des rationnements et des restrictions. Et comme l’écrit BP, ces «restrictions et contrôles nécessaires pour atteindre ses niveaux faibles de consommation d’énergie ont de grande chance d’avoir un coût significatif en terme d’activité économique et de niveau de vie».

Consommation d’énergie dans le monde selon les trois scénarios.

Les énergies fossiles majoritaires en 2050 dans le scénario de continuité

La part des carburants fossiles dans la consommation mondiale d’énergie primaire pourrait être ramenée, en 2050, en dessous de 60% dans le scénario «New Momentum» (contre près de 80% en 2019) et jusqu’à près de 20% dans son scénario «Net Zero ». L’étude voit le charbon «virtuellement éliminé de la production d’électricité d’ici 2050» dans les deux scénarios les plus ambitieux et une baisse rapide de la consommation de gaz à partir des années 2030 et 2040 quand la production d’électricité renouvelable accélère.

Consommation d’énergies fossiles selon les trois scénarios.

Le rôle clé de l’hydrogène pour stocker l’électricité et dans les transports et l’industrie

Dans les scénarios «Accelerated» et «Net Zero», BP estime que l’éolien et le solaire pourraient compter pour près de 70% de la production mondiale d’électricité à l’horizon 2050. Mais ils nécessitent des niveaux d’installations par an de capacités nouvelles éolienne et solaire considérables, compris entre 600 et 750G W dans les années 2030 et entre 700 et 750 GW dans les années 2040. Ce qui «est deux ou trois fois plus rapide que les progressions connues dans le passé».

Cette très forte intégration de productions d’électricité intermittentes et aléatoires dans le système électrique mondial pose des problèmes techniques considérables de stabilité des réseaux. Elle n’est possible pour BP que par le recours massif à l’hydrogène comme moyen de stockage de l’électricité et  donc de flexibilité du système. Mais compte tenu du faible rendement de la production d’hydrogène par électrolyse (hydrogène vert) et ensuite de sa transformation à nouveau en électricité via des piles à combustible, cela signifie que la production électrique devra croitre considérablement.

Part des renouvelables dans la consommation d’énergie primaire selon les scénarios.

Part de la consummation d’électricité dans la consommation totale d’énergie selon les scénarios.

L’autre source de flexibilité du système serait la production nucléaire d’électricité. Elle pourrait augmenter dans le monde de 80% («Accelerated») et plus que doubler («Net Zero») d’ici le milieu du siècle (comptant alors toujours pour près de 10% de la production mondiale d’électricité).

L’hydrogène joue un rôle clé dans les scénarios «Accelerated» et «Net Zero», avec une très forte croissance de la consommation mondiale, pas seulement pour stabiliser les systèmes électriques mais aussi dans les secteurs des transports et dans l’industrie, surtout à partir de 2030. Cet hydrogène serait produit à partir de sources renouvelables (pour près de 65% en 2050) mais également encore à partir d’énergies fossiles (gaz naturel) avec des dispositifs de capture et de stockage de CO2.

Dans les transports routiers, BP voit la part des véhicules électriques dans les ventes de neufs passer à l’échelle mondiale de 2% en 2019 à entre 25 et 30% en 2030 et atour de 90% en 2050 dans les deux scénarios «Accelerated» et «Net Zero».

Production d’hydrogène bas carbone selon les scénarios.

La rédaction