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finance verte Luxembourg

La finance verte détient les clés de la transition


L’après pandémie peut être une opportunité pour accélérer la transition énergétique ou un prétexte pour la remettre à plus tard… Le développement de la finance verte est donc encore plus indispensable pour mobiliser les financements massifs nécessaires pour accélérer l’innovation énergétique et le déploiement de nouvelles infrastructures et filières.

Une étude publiée il y a quelques jours par le Centre Energie & Climat de l’Ifri (Institut français des relations internationales) vient rappeler cette évidence: sans financements massifs de l’innovation et de nouvelles infrastructures, la transition énergétique n’a aucune chance de réussir.

L’étude souligne d’abord le «boom de la finance durable» au cours des dernières années marqué par la progression impressionnante des émissions d’obligations dites «vertes». Elles ont plus que quintuplé dans le monde entre 2015 et 2019 pour atteindre 257 milliards de dollars l’an dernier. La capitalisation mondiale des obligations vertes dépassait ainsi en décembre dernier 500 milliards de dollars. L’Union Européenne joue un rôle central sur ce marché et notamment le Luxembourg, première place mondiale pour les green bonds ou obligations vertes.

Comment définir un investissement vert?

Le potentiel de la finance verte apparait immense si l’on mesure l’importance des fonds gérés dans le monde à partir de critères dits de durabilité. Selon la Global Sustainable Investment Alliance, ils représentaient 30.700 milliards de dollars en 2018, en augmentation de 34% par rapport à 2016. Et dans la seule Union Européenne, ils sont passés de 12.040 à 14.075 milliards de dollars, toujours de 2016 à 2018.

La finance verte «possède une capacité catalytique pour permettre et accélérer la transition vers une économie bas-carbone et se matérialise par une palette d’instruments qui se multiplient. Des obligations aux indices verts, en passant par les prêts verts, et par la mobilisation de capitaux en expansion, le secteur grandit quantitativement et qualitativement» écrit l’Ifri.

Maintenant, la finance verte doit surmonter plusieurs obstacles qui nuisent à son efficacité et à la poursuite de sa croissance. D’abord, «faute de politique énergétique et écologique commune, tant au sein de l’UE que du monde, l’absence d’une classification internationale du caractère durable d’un investissement rend difficile l’allocation des capitaux vers la transition bas-carbone.» En clair, la définition des investissements verts pose problème et peut affecter l’image et l’attractivité de la finance verte s’il existe des doutes sur la finalité réelle des investissements.

Les risques du greenwashing

L’adoption de standards internationaux sur les investissements verts est évidemment une décision politique lourde de conséquences et d’intérêts. Elle conditionne les conditions de financement de modèles économiques, de modes de consommation de l’énergie, de mix énergétiques et de types de mobilité.

«Les risques de greenwashing [verdissement pour des raisons d’image], intentionnels ou non, sont nombreux pour les acteurs de marché: faire des choix d’investissement erronés, car mal informés sur les caractéristiques réelles de durabilité; voir sa réputation discréditée, tant pour les clients que pour les gestionnaires de fonds; ébranler la confiance et les fondations de la finance verte.»

Il existe aussi des problèmes liés à la rentabilité des innovations et des nouvelles infrastructures énergétiques et aux cadres réglementaires et fiscaux de leur développement et de leur exploitation. Il est difficile de construire des modèles économiques qui dépendent de niveaux élevés de subventions qui ne sont pas garantis, de niveaux de taxe carbone qui ne sont pas décidés. Les rentabilités sont difficiles à déterminer dans le temps quand elles sont à la merci de changements politiques peu prévisibles. Surtout dans un pays comme la France caractérisé par une très grande instabilité réglementaire et fiscale…

Dernier problème, l’inadéquation fréquente entre les moyens de financement, notamment les obligations vertes, et la taille relativement limitée des projets innovants. Cela signifie qu’il faut sans doute regrouper différents projets et proposer alors un «cocktail» aux investisseurs institutionnels. Une pratique qui n’est pas fréquente. Comme l’explique l’étude de l’Ifri, les valeurs d’investissement minimales nécessaires pour compenser le coût des émissions sur le marché des obligations vertes sont de l’ordre de 50 millions d’euros dans l’Union Européenne et de 100 millions de dollars aux États-Unis.

La rédaction