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Le coronavirus accélère la disparition des petites stations services


Sans une reprise soutenue de leur activité à partir du 11 mai, plus de 50% des stations services, situées le plus souvent dans les zones rurales, sont menacées de faillite. Le nombre de stations services est en chute libre en France, de 41.500 en 1980 à tout juste 11.000 en 2018.

Depuis les années 1950, la station service est devenue partie intégrante du paysage rural comme urbain. Avec la démocratisation de l’automobile, la station service a quadrillé le territoire et a vu ses services ne cesser de s’élargir. Mais l’âge d’or de la station service appartient au passé. Les populations se concentrent dans des zones de plus en plus densément peuplées offrant de meilleurs système de transport collectifs et le véhicule à moteur thermique est menacé par son homologue électrique dont l’usage est très différent et ne nécessite pas de passer faire le plein dans une station service.

Après avoir vu leur nombre s’effondrer au cours des dernières décennies, de 41.500 en 1980 a à peine plus de 11.000 en 2018. Et comme dans d’autres domaines, l’épidémie de coronavirus joue un rôle d’accélérateur des évolutions. L’effondrement de la consommation de carburant menace aujourd’hui de disparition les stations services les plus petites situées dans les zones rurales.

Plus de 50% menacées de faillite

Plus de 50% d’entres elles estiment «probable» leur faillite sans un retour soutenu de l’activité à partir du 11 mai, prévenait à la fin de la semaine dernière le Conseil national des professions de l’automobile (CNPA), Elles sont d’autant plus vulnérables au confinement qu’elles sont affaiblies par des marges très faibles liées à la concurrence des grandes surface qui ont fait des carburants un produit d’appel. «52% [des stations  services] confirment être impactés très fortement et estiment probable le risque de faillite de leur entreprise sans un retour d’activité soutenue le 11 mai… et 4% confirment qu’ils déposeront le bilan de leur entreprise avant le 11 mai», écrit le CNPA après avoir interrogé 1.800 exploitants de stations services implantées en zones rurales. Environ 70% des stations services sont situés en zones rurales. Si elles ferment, cela renforcera encore le sentiment d’abandon de la «France périphérique», qui a donné naissance au mouvement des gilets jaunes.

La Fédération Nationale de l’Artisanat Automobile (FNA) a également alerté les pouvoirs publics. Elle demande des mesures de sauvegarde, avec la création d’un fonds de solidarité dédié. La FNA souhaite également la fin des refus de livraisons par les pétroliers aux stations en raison d’impayés.

Pour donner un ordre d’idée de la violence du choc, 77% des stations services de campagnes ont vu leurs ventes de carburants diminuer de 80%. Et celles qui pensent survivre à la crise seront quoi qu’il arrive dans une situation difficile. Ainsi, 40% estiment devoir reporter ensuite des investissements prévus de longue date et 30% envisagent même de les annuler. Cela est d’autant plus préoccupant, que si les stations services n’investissent pas dans de nouveaux services, ne diversifient pas leurs offres et ne s’adaptent pas aux changements de motorisation, elles ne pourront pas survivre. Car la vente de carburants n’est plus suffisamment rentable. La rémunération des stations services est en moyenne de 1 centime d’euro net par litre de carburant vendu…  Une étude du Boston Consulting Group, rendue publique en juillet 2019, concluait que «près de 80% de la vente de carburant au détail pourrait ne plus être rentable dans 15 ans».

Se réinventer pour survivre

Pour espérer survivre, les petites stations services doivent absolument élargir les services qu’elles offrent et… avoir les moyens de le faire. Le lavage, la mécanique, des postes de distribution de GNV et d’hydrogène, des bornes électriques, des consignes automatiques, des points de distribution de colis et de courriers, des services de distribution alimentaire, de restauration, de boutique diverse… Devenir dans les zones rurales, les points de rencontre qui ont disparu. A terme, pour les stations situées sur des voies fréquentées par des voitures électriques à batteries, le temps d’attente lié à la recharge ouvre la voie à de nouveaux services.

Le nombre de stations services va continuer à rapidement décroître, cela semble inéluctable. Mais elles ne sont pas pour autant toutes condamnées, notamment sur les parcours longues distances pour les véhicules électriques et avec la montée en puissance annoncée des véhicules à hydrogène dont il faudra bien remplir les réservoirs. Les pétroliers Shell et BP entendent installer systématiquement des bornes de recharge électriques dans leurs stations. Elon Musk, le patron de Tesla, s’intéresse lui à l’idée de construire des restaurants et des cinémas drive-in avec ses bornes de recharge rapides.

La rédaction