<i class='fa fa-lock' aria-hidden='true'></i> Renouvelables: ne pas jeter le bébé avec l’eau du bain

8 mai 2025

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Renouvelables: ne pas jeter le bébé avec l’eau du bain

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Les renouvelables intermittents ne sont ni une solution miracle à la transition, ni le mal absolu. L’éolien et le solaire ont de multiples inconvénients, à commencer par leur intermittence et leur coût, surtout pour l’éolien, mais offrent aussi des avantages en produisant une électricité décarbonée locale. Ils produisent toujours trop ou pas assez. Il faut juste admettre cette réalité et donc s’y adapter ce qui n’est pas insurmontable à condition, évidemment, de moderniser des systèmes électriques trop fragiles si la part de production intermittente devient trop importante. Cela coûte cher et se heurte aux oppositions locales. Mais quand on investit depuis des années, comme l'Espagne, l'Allemagne ou le Royaume-Uni, des centaines de milliards d'euros dans les éoliennes et le photovoltaïque, il faut savoir ce que l’on veut.

En matière d’énergie, les modes sont dangereuses et l’on ne peut pas nier la réalité trop longtemps. Elle finit toujours par vous rattraper. L’Europe a fini par le mesurer quand l’invasion de l’Ukraine par la Russie a soudain révélé à tous sa dépendance au gaz russe. L’épisode du Blackout de la péninsule ibérique le 28 avril marque un autre réveil difficile.Les réseaux électriques ne sont pas du tout adaptés à une part trop grande de production provenant de sources renouvelables intermittentes (éolienne et solaire). Plus elles sont importantes en proportion, plus les réseaux sont fragilisés et aussi moins les prix sont stables du fait de productions intermittentes toujours trop massives ou trop limitées.

Savoir ce que l’on veut

Cela contraint pour équilibrer en permanence la production et la consommation d’électricité et éviter les Blackout… à avoir toujours à disposition des moyens de production dits pilotables, fossiles (gaz et charbon), hydraulique et nucléaire. Il y a en outre des questions techniques qui tiennent au fait que les centrales traditionnelles et pilotables sécurisent la tension sur les réseaux car elles n’ont pas à transformer du courant continu en courant alternatif. Les centrales à gaz et à charbon, les réacteurs nucléaires et les barrages hydrauliques avec leurs turbines utilisent des rotors, de gigantesques machines tournantes, qui assurent l’inertie de la fréquence à 50 Hz sur les lignes à haute tension en Europe (60 Hz aux Etats-Unis).

Il faut aussi et surtout savoir ce que l’on veut. Si on privilégie les renouvelables intermittents et on investit des centaines de milliards d’euros dans ses équipements, la stratégie européenne imposée par l’Allemagne et la Commission, il faut alors impérativement moderniser les réseaux électriques. En Allemagne, autre champion des renouvelables intermittents avec l’Espagne, l’échec de la révolution énergétique (Energiewende), tient notamment au fait que le réseau électrique à haute tension est totalement inadapté et sous-développé. Selon la Commission européenne, les besoins d’investissements dans les réseaux de l’Union se chiffrent à 584 milliards d’euros entre 2024 et 2030…

Les éoliennes et les panneaux solaires correspondent à certains besoins

Pour autant, si les lobbys idéologiques et économiques éolien et solaire ont longtemps sous-estimé et même nié les inconvénients techniques et économiques des renouvelables intermittents – le fait qu’ils nécessitent des surfaces au sol importantes, qu’il faut des quantités considérables de minéraux et de métaux pour les fabriqués et qu’il s’agit d’équipements souvent importés – ils ne sont pas à rejeter par principe et peuvent être très utiles. Tout est une question de proportion de la production électrique, d’adaptation des réseaux et des comportements de consommation. Les renouvelables intermittents ne sont ni la solution miracle de la transition, ni le mal absolu.

Dans les zones géographiques où les vents sont réguliers et où les nuisances sont insignifiantes, les éoliennes terrestres et marines produisent assez régulièrement une électricité décarbonée. Il convient juste de ne pas les subventionner à outrance et contrôler les phénomènes répandus de corruptions locales pour privilégier les projets économiquement sains. De la même façon, dans les régions ensoleillés une grande partie de l’année, les parcs solaires photovoltaïques font sens. Mais il faut connaître leurs limites et adapter les réseaux et les équipements de production électrique à l’intermittence et mettre en place des moyens de stockage ou d’utilisation de l’énergie en surabondance des éoliennes et des panneaux solaires qui par définition produisent toujours trop ou trop peu.

En France, le gouvernement vient de décider de contraindre tous les acteurs solaires et éoliens à mettre à l’arrêt leurs équipements quand la sécurité du réseau le nécessite. C’est une bonne chose. Pour le moment, seules les installations de plus de 10 MW étaient concernées mais cela devient problématique. Les petites installations solaires deviennent critiques… si on les additionne.

Le stockage, à développer mais sans trop d’illusions

Il y a aussi la solution du stockage de l’électricité qui n’est ni techniquement, ni économiquement aisée. Contrairement à ce que voudraient nous faire croire les dogmatiques du tout renouvelables. Le stockage est ainsi devenu la martingale de tous les modèles théoriques de transition… Mais il faut encore considérablement développer les moyens et les technologies utilisées avant de rêver. D’abord, l’électricité ne se stocke pas. C’est une impossibilité. On peut la transformer mécaniquement (hydraulique) ou chimiquement (batteries, hydrogène) avant d’en produire à nouveau. Aujourd’hui, à l’échelle des réseaux et des besoins, seul l’hydraulique peut jouer et joue un rôle. Mais il faudrait investir massivement dans les STEPs (Stations de transfert d’énergie par pompage), ce qui se heurte aux moyens financiers disponibles, à la rentabilité des installations… et à l’opposition instantanée et souvent violente des mouvements écologistes. Eux-aussi ne savent pas souvent ce qu’ils veulent.

Transformer l’électricité excédentaire en hydrogène décarboné est aussi une solution à développer, en dépit des difficultés de cette filière naissante, victime elle aussi d’un excès d’enthousiasme et d’une mode. L’hydrogène vert est dans certains domaines, transports sur longue distance et industrie lourde, le seul véritable substitut aux carburants fossiles.

Tout cela pour dire, que la transition énergétique ne peut pas réussir en suivant des schémas rigides, dogmatiques et irréalistes techniquement, économiquement et socialement. Elle nécessite d’avoir, ce qui manque le plus, une vision d’ensemble souple et le recours à de multiples moyens et équipements au fil des années dont il faut coordonner le fonctionnement. Cela s’appelle du pragmatisme.

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