Transitions & Energies

Transition: l’ingénierie et l’économie bien plus importants que la politique


Plutôt que d’essayer de convaincre les pays et les populations de changer leur mode de vie et leur façon de produire et d’utiliser l’énergie, nous ferions mieux de développer et de proposer des technologies permettant de le faire sans douleur et à moindre coût.

Comme l’explique dans le magazine Scientific American Solomon Goldstein-Rose, un activiste du climat qui a notamment travaillé à la Maison Blanche sous la présidence Obama et au Congrès américain, le problème de la transition est toujours présenté par les gouvernements, par les militants, par les institutions internationales comme une question avant tout politique. Il suffit de le vouloir. Il suffit de se mobiliser. Il suffit d’y mettre suffisamment d’argent. Il suffit de contraindre les entreprises, les marchés, les pays, les populations…

«Comme si toutes les technologies nécessaires pour régler le problème étaient déjà disponibles et immédiatement utilisables à des coûts raisonnables. Le défi étant simplement de convaincre chaque personne et chaque pays de «faire sa part»», écrit-il.

C’est un problème qui ne peut se régler que par l’ingénierie et l’innovation

En abordant le problème comme cela, il est impossible de le régler. D’une part, parce que les technologies n’existent pas et quand elles existent, elles ne sont pas bon marché et sans de nombreuses contraintes dans la grande majorité des cas. D’autre part, les pays en développement, qui émettent les deux-tiers des gaz à effet de serre, ne sont pas prêts à adopter ses technologies. «On peut essayer aussi longtemps que nous voulons de convaincre l’Inde, par exemple, de «faire sa part» en adoptant des systèmes plus coûteux et en renvoyant dans la misère des populations qui viennent juste d’accéder à l’électricité».

Pour Solomon Goldstein-Rose, la seule façon d’aborder sérieusement le problème et de se donner les moyens d’être proche de la neutralité carbone en 2050 consiste à considérer qu’il s’agit avant tout d’un défi d’ingénierie. A savoir, remplacer tous les systèmes qui émettent des gaz à effet de serre par d’autres qui n’en émettent pas. Et rendre les systèmes propres, dont beaucoup sont simplement aujourd’hui au stade du développement, suffisamment bon marché pour conquérir rapidement les marchés mondiaux.

L’auteur de l’article de Scientific American estime que cela passe par un très grand programme d’investissement et d’innovation public du type de celui qui a permis à l’homme de marcher sur la lune. Cela passe par une planification et une mobilisation scientifique et technologique, industrielle et financière massives. L’objectif est de devenir plus performant dans tous les domaines que les énergies fossiles.

Un programme comme celui de la conquête de la lune

Il faut donc totalement changer la façon dont est envisagée et construite la transition. Le fait qu’elle soit considérée surtout comme une question politique «est à la fois irréaliste et déprimant… Nous ne sommes pas condamnés. Tout simplement, nous nous trompons sur ce que doit être notre objectif ».

Il faut cesser de considérer que les pays développés doivent décarboner leurs économies et leurs sociétés d’ici 2050 et faire pression sur les autres pays pour qu’ils fassent la même chose. Nous devons avant rendre la décarbonisation attrayante, facile et abordable pour tout le monde.

Solomon Goldstein-Rose ajoute que cet état d’esprit est la meilleure antidote contre l’argument qui consiste à dire que nous pouvons tous les efforts et tous les sacrifices, si le reste du monde n’en fait pas, cela ne sert à rien. Aborder ce problème avant tout comme une question d’investissement, de technique, de production à grande échelle est aussi un bon moyen de rassurer les jeunes générations sur le fait que la transition est un objectif réaliste et que nous ne sommes pas condamnés à l’apocalypse. Et qu’il faut se retrousser les manches.

«Régler la question du changement climatique signifie changer des systèmes, pas des modes de vies… Nous pouvons créer un consensus sur ce qui peut être réalisé et rendre les gens plus optimistes et plus confortables sur le monde qui naitra de cette transformation. Et nous pouvons apporter de l’espoir aux jeunes générations qui doivent savoir que c’est totalement faisable de régler ce problème.»

La rédaction