Transitions & Energies
Dessin de l'usine chilienne de Porsche et Siemens Energy

Porsche a lancé la construction de son usine de carburant synthétique vert


Le prestigieux constructeur automobile allemand, dont 70% des voitures produites depuis l’origine sont encore en circulation, ne va pas abandonner ses clients. Il va commencer l’an prochain la fabrication d’un carburant synthétique à base d’hydrogène vert et de CO2 récupéré dans l’atmosphère dont l’empreinte carbone sera proche de zéro. Il permettra, dans un premier temps, de continuer à faire rouler les modèles anciens et mythiques de la marque. Avant d’être commercialisé à une échelle plus large.

Le constructeur allemand de voitures de sport et de luxe Porsche et ses partenaires dont Siemens Energy, AME, Enel, ExxonMobil et le groupe pétrolier chilien ENAP ont lancé la construction de l’usine qui produira un nouveau type de carburant synthétique vert à partir de 2022. L’usine se trouve au sud du Chili, non loin de Punta Arenas, (voir une esquisse ci-dessus) et le carburant sera utilisé dans un premier temps pour propulser des voitures de course, des voitures de sport comme les mythiques Porsche 911 et 356 et des voitures de collection.

Un carburant fabriqué avec de l’hydrogène vert et du CO2 récupéré dans l’atmosphère

Sa particularité est qu’il s’agira d’un carburant synthétique qui n’émettra presque aucun gaz à effet de serre lors de sa fabrication. Les procédés permettant de produire des carburants synthétiques sont maîtrisés depuis longtemps. Ils s’inspirent de la technique Fischer-Topsch de liquéfaction du charbon utilisée par l’Allemagne à la fin de la Seconde guerre mondiale pour produire, faute de pétrole, des carburants liquides. Une technologie qui a été ensuite améliorée par l’Afrique du Sud de l’apartheid, qui était sous embargo pétrolier, et qui a même été relancée récemment à une petite échelle par la Chine. Le procédé actuel consiste à synthétiser du carbone (sous forme de monoxyde de carbone ou de dioxyde de carbone) avec de lʼhydrogène pour obtenir un stade préliminaire de carburant. Mais le carbone aujourd’hui n’est plus obtenu à partir de charbon mais avec du CO2 récupéré et retiré de l’atmosphère. Ce gaz combiné à de l’hydrogène vert (fabriqué par électrolyse avec de l’électricité décarbonée) permet de produire de l’essence sans énergie fossile.

L’usine chilienne de Porsche va utiliser des électrolyseurs qui vont séparer de l’eau en molécules d’oxygène et d’hydrogène en utilisant des éoliennes. La région du Chili choisit pour implanter l’usine est l’une de celle qui bénéficie dans le monde des vents les plus constants. Du CO2 sera filtré dans l’air et combiné avec l’hydrogène pour produire du méthanol synthétique. Ce carburant est parfaitement adapté aux moteurs thermiques à piston.

Porsche considère que ce carburant doit permettre à terme aux voitures à moteurs à combustion interne de continuer à circuler là où elles seront interdites. «Notre icône, la 911 est particulièrement adaptée à l’utilisation de carburants synthétiques. Mais c’est aussi le cas de nos véhicules historiques auxquels nous tenons tant», explique Michael Steiner qui dirige la recherche et le développement de Porsche. Il ajoute que qu’environ 70% des voitures fabriquées par Porsche depuis que le constructeur existe sont toujours en circulation.

Le prix de revient est aujourd’hui de 2 euros par litre

En théorie, faire fonctionner une Porsche avec le carburant synthétique vert qui sera fabriqué ne nécessitera aucune modification mécanique. «Les spécifications de ce nouveau carburant sont exactement les mêmes que ceux existant. Vous pouvez utiliser un tel carburant dans une 993 (un modèle de Porsche 911 avec un moteur refroidi par air) dans endommager le moteur et sans avoir à faire des modifications techniques», affirme Michael Steiner au magazine Hagerty.

Mais il y a évidemment un sérieux inconvénient à l’utilisation d’un tel carburant. Son coût! Quand il arrivera en Europe où il sera distribué par ExxonMobil, son coût sera d’environ 2 euros par litre… avant les taxes. L’équipementier Bosch est plus optimiste. Il estime qu’à l’horizon 2030, le carburant synthétique pourrait coûter hors taxes entre 1,20 et 1,40 euro le litre et 1 euro, pas moins, à l’horizon 2050.

Porsche compte commencer la production de carburant synthétique vert en 2022 et l’utiliser d’abord dans la Supercup, une compétition réservée aux 911. L’usine devrait commencer par produire l’an prochain 130.000 litres de carburant avant de monter en puissance et d’en fabriquer 55 millions de litres en 2024 et 550 millions de litres en 2026.

Au début, le carburant sera distribué pour être testé lors d’événements organisés par Porsche comme des courses ou des essais et présentations de véhicules actuels ou historiques. Il y a aussi une possibilité que chaque véhicule neuf à moteur thermique vendu par le constructeur ait son réservoir rempli de carburant synthétique avant d’être livré à son acheteur. Après cela, Porsche compte commercialiser son carburant synthétique dans des pays où le niveau des taxes sur les carburants pétroliers et les interdictions de circulation les rendront attractifs et compétitifs. Il se pourrait aussi qu’il soit utilisé en Formule 1 qui a annoncé son intention d’être neutre sur le plan carbone d’ici 2030.

La rédaction