La créativité administrative de la France et de ses technocrates est sans limite. Pour preuve, le nouveau « machin » baptisé Stratégie pluriannuelle des financements de la transition écologique et de la politique énergétique nationale (SPAFTE). Il s’agit en fait de la deuxième édition d’un dispositif créé par la loi de décembre 2023 de programmation des finances publiques.
Il s’agit explique le ministère de l’Economie et des Finances de « la traduction en euros des documents de transition écologique qui existent ». Comme si les programmes et projets n’étaient pas déjà chiffrés…
Justifier le travail de l’administration et des parlementaires
La SPAFTE est inscrite dans le Code de l’énergie que le Gouvernement doit transmettre « chaque année au Parlement, avant le début de la session ordinaire, une stratégie pluriannuelle qui définit les financements de la transition écologique et de la politique énergétique nationale ». C’est un document complémentaire du Budget vert qui est un rapport sur l’impact environnemental du budget de l’État, publié tous les ans depuis 2020. Des rapports qui se multiplient, s’additionnent et ne changent strictement rien aux incohérences et aux errements de la politique de transition énergétique du pays.
Mais l’administration, en l’occurrence le Trésor et le ministère de la Transition écologique, justifie son existence et les parlementaires la leur. On est dans l’incantatoire et les vœux pieux. « Pour atteindre nos objectifs climatiques, les investissements bas-carbone annuels devront plus que doubler d’ici à 2030 ». Comment ?
A quoi et à qui sert-elle ?
La première édition de la SPAFTE ; publiée en octobre 2024, était présentée comme un moyen « pour amplifier une mobilisation efficace des financements publics et privés au service de ces objectifs [de transition] ». En fait, on ne sait toujours pas à quoi peut-elle bien servir et à qui ? Et personne ne le sait vraiment.
Elle dresse « un panorama des financements de l’ensemble des acteurs de l’économie en faveur de la transition écologique, et présente une perspective pluriannuelle inédite, en retraçant les tendances des années récentes et en présentant des scénarios pour les années à venir ». Plus fort encore, la SPAFTE a aussi vocation à analyser l’ensemble des financements et à les juger – en fonction de quels critères définis par qui ? – selon leur caractère « favorable », « défavorable » ou « neutre » pour la transition écologique. Des critères établis selon six axes environnementaux qui « correspondent, à quelques variations de périmètres près, à ceux mobilisés dans la taxonomie européenne » : l’atténuation du changement climatique, l’adaptation au changement climatique, la gestion de l’eau, la gestion des déchets, la réduction des pollutions et la protection de la biodiversité.
Hors sol
Il s’agit selon le ministère de la Transition écologique d’une sorte de « business report » censé donner de la visibilité aux investisseurs, malgré les nombreuses incertitudes… Sans commentaire. Il faudrait peut-être expliquer à l’administration que les investisseurs privés quand ils s’engagent dans un projet c’est en fonction de sa rentabilité future, de son marché, de sa compétitivité, de la valeur créée. Le reste, c’est de la littérature.
La SPAFTE 2025 a donc été publiée le 27 octobre et se félicite que les investissements bas carbone dans les transports, les bâtiments, le secteur énergétique et l’industrie en France « ont connu une forte augmentation depuis 2011 jusqu’à atteindre 116 Md € 2024 en 2023, puis revenir à 113 Md € 2024 en 2024 ». La baisse en 2024 est principalement liée à de moindres investissements dans les logements.
Ces investissements devront augmenter « de + 110 milliards d’euros en 2030 par rapport à 2021, et ont vocation à être notamment financés par la réorientation d’autres investissements »… Lesquels et par qui ?
Incantations
La SPAFTE 2025 souligne que le secteur public « investit aujourd’hui davantage que le secteur privé en faveur de la décarbonation, proportionnellement à ses investissements totaux ». En 2022, 20% des investissements du secteur public étaient consacrés à des actifs bas carbone, contre 13% pour le secteur privé qui compte pour plus de 80% des investissements dans l’ensemble de l’économie. Le salut viendra du privé. A fortiori dans un pays surendetté.
On a le droit également à des banalités répétées depuis des années sans conséquences. « Les investissements carbonés devront êtredivisés par deux d’ici à 2030. La plupart de cette diminution concerne les véhicules thermiques. Leur réorientation vers des projets bas-carbone constitue une opportunité majeure pour accélérer la transition et renforcer la souveraineté énergétique de la France en réduisant sa dépendance aux importations d’énergies fossiles ».
« Une large gamme d’outils de politique économique doit contribuer à promouvoir ces financements. Elle inclut la mise en place de mesures réglementaires simples et adéquates, d’un cadre fiscal adapté pour favoriser les actions induisant le moins d’émissions de gaz à effet de serre, de soutiens financiers publics ciblés, de mesures pour faciliter l’accès à l’information et d’actions de sensibilisation ». Y’a qu’a faut qu’on !













