Depuis sa création en 2006, il y a deux décennies, l’Etat est incapable de mettre en place un diagnostic de performance énergétique des logements, DPE, pertinent et fiable. Résultat, des milliards d’euros sont dépensés tous les ans dans la rénovation énergétique de logements avec des résultats incertains, sans parler des arnaques en tous genres. Les fraudes aux DPE sont massives. Les « DPE de complaisance », qui surclassent un bien grâce à de petits arrangements, et ceux complétement faux qui sont de plus en plus nombreux, selon une étude récente de la start-up KRNO dévoilée par « Les Echos ».
Les scandales se succédent sans pour autant que l’administration, les gouvernements et l’Anah (Agence nationale de l’habitat) se montrent plus efficaces et plus soucieux de l’argent public et de celui des Français. Pour sortir de l’ornière, le député Renaissance Daniel Labaronne, chargé d’une mission par le gouvernement, préconise de créer un ordre des diagnostiqueurs immobiliers, comme il en existe dans d’autres professions comme les médecins, les architectes ou les experts-comptables.
Le rafistolage permanent
En attendant, le gouvernement vient donc de mettre en place une énième révision de la méthode de calcul du DPE qui entre en vigueur le 1er janvier 2026. Elle doit permettre à 850.000 logements qui se chauffent à l’électricité de sortir de la catégorie des « passoires thermiques ». La précédente révision remonte à l’année 2024 après celle de 2021. Elles n’ont pas vraiment changé grand-chose…
Faire réaliser un DPE est obligatoire lors de la mise en vente ou en location d’un bien immobilier. Le DPE classe les logements selon une échelle qui va de A – très économe – à G – gros consommateur d’énergie. Pour le déterminer, les diagnostiqueurs prennent en compte les caractéristiques du bâti : surface habitable, matériaux de construction, type d’isolation et de chauffage, ventilation, production d’eau chaude… Puis, à partir d’un logiciel unique, ces experts calculent la classe énergétique du bien.
Corriger une absurdité favorisant les combustibles fossiles
Là ou cela se complique est que la lettre obtenue ne reflète pas exactement la consommation finale d’énergie, c’est-à-dire le montant estimé de la facture, mais celle de l’énergie primaire nécessaire au chauffage et à la production d’eau chaude. Pour un logement qui utilise des combustibles fossiles (gaz, fioul…), c’est sans conséquence. En revanche, s’il est tout électrique, le DPE prévoit un coefficient dit de conversion pour tenir compte de l’énergie utilisée par les centrales qui la produisent ainsi que les déperditions sur le réseau. Jusqu’en 2025 la France imposait un coefficient de 2,3 ! Ce qui signifiait qu’un logement dont la consommation d’énergie finale était de 100 kWh/m2 affichait une consommation primaire de 230 kWh/m2 s’il était chauffé électriquement, contre 100 kWh/m2 s’il utilisait le gaz. On marchait sur la tête. Cela venait à favoriser la consommation de combustibles fossiles émetteurs de gaz à effet de serre au détriment d’une électricité dont la production en France est décarbonée à 95% !
Pour corriger, en partie seulement, cette absurdité, la formule change. A compter du 1er janvier 2026, le coefficient de conversion de l’électricité est abaissé à 1,9. Les biens immobiliers qui utilisent cette énergie seront donc moins pénalisés. Cela permettra, selon l’Ademe, à près de 850.000 logements de sortir mécaniquement du statut de passoire thermique (notes F ou G).
Fraudes massives
Tous les DPE édités à partir du 1er janvier 2026 seront calculés en intégrant le nouveau coefficient. Mais si vous avez fait réaliser ce document avant cette date, vous pourrez le mettre à jour gratuitement, sans avoir besoin de faire appel de nouveau à un diagnostiqueur. Il suffira de se rendre sur le site dédié mis en place par l’Ademe. Ensuite, vous devrez entrer le numéro de votre ancien DPE, indiqué sur la première page. Vous pourrez alors télécharger une attestation officielle sur laquelle sera mentionnée votre nouvelle note. Evidemment, si tout fonctionne correctement…
Et puis il y a les fraudes. Les « DPE de complaisance », qui surclassent un bien grâce à de petits arrangements, et ceux complétement faux et fabriqués qui sont de plus en plus nombreux, selon une étude récente de la start-up KRNO.
Un million de faux DPE en circulation
L’entreprise spécialisée dans la traque aux anomalies dans les DPE s’est plongée dans l’immense base de données de l’Ademe pour étudier les notes de 6,6 millions de diagnostics réalisés entre 2021 et 2025. Résultat, des pics apparaissent avant chaque passage à la note inférieure, traduisant des biens artificiellement surclassés.
Et ces DPE de complaisance ne sont qu’une partie du problème. Il existe aussi des documents entièrement faux réalisés sans visite d’un diagnostiqueur, ou encore devenus « obsolètes » sans qu’il soit possible de le deviner en consultant le document. KRNO estime ces derniers à environ un million en circulation…














