<i class='fa fa-lock' aria-hidden='true'></i> Les cours du pétrole replongent brutalement, un soutien inespéré pour la conjoncture mondiale

5 mai 2025

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Les cours du pétrole replongent brutalement, un soutien inespéré pour la conjoncture mondiale

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Après un court répit à la suite du recul de l’administration Trump dans sa guerre commerciale tous azimuts, à l’exception évidemment de celle menée contre la Chine, les prix du pétrole ont recommencé à baisser rapidement. Ils ont perdu maintenant plus de 27% depuis la mi janvier et sont tombés à leur plus bas niveau depuis plus de quatre ans, au sortir de la pandémie de Covid-19. Cela devrait permettre de limiter, au moins en partie, le risque grandissant de récession mondiale.

En un peu plus de cent jours, l’administration Trump n’a pas réussi grand-chose, si ce n’est de semer le chaos dans l’économie et la géopolitique mondiales. Mais elle a tenu, peut être sans vraiment le vouloir, une promesse de campagne de Donald Trump, faire baisser sensiblement les cours du pétrole. C’est surtout la conséquence de la récession qui se profile aux Etats-Unis et éventuellement dans le reste du monde et de la dégradation très rapide de la conjoncture en Chine. C’est aussi la conséquence d’un changement soudain de stratégie par l’Arabie Saoudite qui mène le cartel OPEP+ et a décidé de privilégier les parts de marché sur le contrôle des prix. Riyad semble ainsi préférer renforcer sa relation avec l’Amérique de Trump plutôt qu’avec la Russie de Poutine pour qui la baisse prolongée des cours du baril n’est pas du tout une bonne nouvelle pour financer son effort de guerre.

La Russie, tout en étant un important producteur et exportateur, a un impact assez limité sur le marché pétrolier mondial. Rappelons que les Etats-Unis sont le principal producteur de pétrole, la Chine le principal importateur et l’Arabie Saoudite le principal exportateur. Donald Trump doit faire une tournée au Moyen-Orient ce mois-ci avec à la clé une ambition de coopération énergétique plus étroite, notamment avec l’Arabie Saoudite.

Le baril a perdu plus de 27% depuis la mi-janvier

Le baril de qualité Brent s’échangeait ainsi lundi 5 mai au début de la journée autour de 59 dollars et le baril de qualité WTI autour de 56 dollars. Une baisse spectaculaire de respectivement 27% et 28% depuis la mi-janvier. Le baril est ainsi au plus bas depuis plus de quatre ans (février 2021), au sortir alors de la récession planétaire née de la pandémie de Covid-19.

Après le lancement par Donald Trump de sa guerre commerciale tous azimuts il y a près d’un mois, le pétrole s’était alors littéralement effondré dans la foulée des marchés financiers. Puis quand l’administration Trump a fait machine arrière, pour éviter justement un effondrement des marchés, et s’est lancée dans un bras de fer uniquement avec la Chine, le pétrole a rebondi… mais en fait pas pour longtemps.

Il y a deux raisons à cela, la stratégie du cartel élargi OPEP+ d’augmentation de sa production quand pourtant la demande reste atone et la conjoncture américaine et chinoise qui se dégrade rapidement du fait évidemment de la guerre commerciale entre les deux premières puissances économiques. La banque JPMorgan vient de réviser à la hausse la probabilité d’une récession mondiale cette année à 60%…

Changement radical de stratégie du cartel OPEP+

Les marchés pétroliers ont subi un véritable choc quand l’OPEP+ a surpris tout le monde en annonçant à nouveau une augmentation de sa production plus importante que prévu au mois de juin. Lors d’une réunion virtuelle qui s’est tenue le 3 mai, les pays producteurs, du cartel menés par l’Arabie, ont décidé d’augmenter la production collective de 411.000 barils par jour, près du triple du volume initialement prévu. Cette décision fait suite à une augmentation identique (411.000 barils par jour) annoncée pour le mois de mai. Et surtout cela marque un changement radical de stratégie de l’OPEP+ qui depuis cinq ans limite sa production pour soutenir les cours du pétrole. Riyad a décidé maintenant de privilégier les parts de marché et non de soutenir les prix. A cela deux raisons. La première est de « discipliner » les membres qui ne respectent pas leurs quotas comme le Kazakhstan et l’Irak. La seconde est de s’attirer les bonnes grâces de l’administration Trump.

« L’OPEP+ vient de lancer une bombe sur le marché pétrolier », résume Jorge Leon, de Rystad Energy, cité par l’agence Bloomberg. « L’Arabie saoudite cherche à punir le manque de conformité de certains pays producteurs et aussi à s’attirer les faveurs du président Trump », ajoute-t-il.

Une conjoncture mondiale défaillante

Et la Russie n’est pas en mesure d’empêcher les augmentations de production même si elles lui portent préjudice. Rappelons que l’OPEP+ regroupe les 13 pays producteurs de l’OPEP historique mené par l’Arabie Saoudite et dix pays producteurs qui ont rejoint le cartel, menés par la Russie. Aujourd’hui les pays de l’OPEP+ limitent leurs productions d’environ 5 millions de barils par jour, une situation de plus en plus difficile à accepter pour certains. La cohésion du cartel est menacée, surtout quand la stratégie de limitation de la production n’empêche plus les prix de baisser.

Et cela pourrait durer et soutenir ainsi une conjoncture économique mondiale défaillante. Car l’économie américaine pourra difficilement échapper à une récession après avoir vu son activité se contracter au premier trimestre (-0,3%), pour la première fois depuis trois ans. La définition technique d’une récession, c’est deux trimestres consécutifs de décroissance. La guerre commerciale de Donald Trump perturbe considérablement les flux commerciaux mondiaux et pèse ainsi directement sur la consommation de pétrole. L’Agence internationale de l’énergie (AIE), l’OPEP et le Département américain de l’énergie, ont revu à la baisse leurs perspectives de croissance de la demande de barils.

Effondrement du trafic de conteneurs et aux Etats-Unis le transport routier est menacé

La guerre commerciale entre les États-Unis et la Chine affecte déjà la demande de carburants pétroliers dans le transport maritime et l’aviation, et cela devrait rapidement se répercuter dans le transport routier aux États-Unis et réduire la demande de diesel. Le transport maritime et l’aviation représentent à eux deux 10 % de la consommation mondiale de pétrole.

Le trafic de conteneurs de la Chine vers les États-Unis est en chute libre. Hapag-Lloyd, l’un des principaux armateurs au monde, a déclaré à l’agence Reuters la semaine dernière que ses clients avaient déjà annulé 30% des expéditions de la Chine vers les États-Unis en raison de l’escalade des droits de douane américains sur les importations chinoises.

Gene Seroka, directeur exécutif du port de Los Angeles, a annoncé sur la chaîne de télévision américaine CNBC, qu’il anticipait une dégringolade de 35% du volume de fret en provenance de Chine cette semaine par rapport à la même période en 2024.

Et l’effondrement des routes maritimes entre la Chine et les États-Unis touchera inévitablement le secteur du transport routier américain. D’ici la mi-mai, les navires porte-conteneurs à destination des ports américains s’arrêteront, d’ici fin mai, la demande de transport routier s’arrêtera, début juin, on assistera à des licenciements dans le secteur du transport routier et de la vente au détail, prévient Apollo Global Management. Les compagnies aériennes constatent pour leur part déjà une baisse de la demande dans le secteur des loisirs, les consommateurs dépensant moins, anticipant une augmentation de l’inflation, une détérioration de l’économie et des risques de chômage.

Et l’économie chinoise donne aussi des signes de faiblesse. L’indice PMI manufacturier du pays s’est effondré à 49,0 en avril, signalant une contraction. Sans surprise, l’indice des commandes à l’exportation est particulièrement préoccupant : il a plongé à son niveau le plus bas depuis 2012, en-dehors des anomalies liées à la pandémie. Les analystes ont réagi en réduisant les prévisions de croissance pour l’ensemble de l’année à seulement 3,5%, jetant le doute sur la solidité de la demande intérieure chinoise.

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