<i class='fa fa-lock' aria-hidden='true'></i> Comment la Chine et l’Iran ont organisé un gigantesque marché clandestin pour le pétrole de la République islamique

5 décembre 2024

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Comment la Chine et l’Iran ont organisé un gigantesque marché clandestin pour le pétrole de la République islamique

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Selon une enquête explosive réalisée par l’agence Bloomberg utilisant notamment les observations satellites, à l’est de la Malaisie se trouve une zone maritime devenue le plus grand lieu de transfert clandestin de pétrole de navire à navire. La Chine achèterait ainsi massivement le pétrole iranien sous embargo américain. Selon les calculs de Bloomberg, cela représenterait 350 millions de barils sur les neuf premiers mois de l’année et même à prix cassés plus de 20 milliards de dollars. Pour l’agence Reuters, Pékin importe ainsi 13% de son pétrole de la République des mollahs dont officiellement elle n’achète pas une goutte depuis 2022... La question à partir du 20 janvier et l'arrivée à la Maison Blanche de Donald Trump va être de savoir ce que son administration va prendre comme mesures contre la Chine et la République islamique après ses révélations.

Une enquête menée par l’agence Bloomberg montre que  La Chine et la République islamique d’Iran ont établi un système complexe de transferts de navire à navire dans la mer de Chine méridionale afin de contourner les sanctions américaines sur le pétrole iranien. Ce système commercial clandestin permet à la Chine d’importer des quantités très importantes de pétrole iranien à prix cassés en évitant, jusqu’à aujourd’hui, de s’exposer à des sanctions américaines. Selon l’agence Reuters, le brut iranien représente ainsi pas moins de 13% des importations de pétrole chinoises. Mais officiellement, Pékin n’en achète plus une goutte depuis 2022…

La question aujourd’hui est de savoir si les intentions annoncées de Donald Trump après son entrée en fonction le 20 janvier prochain de mettre à nouveau un « maximum de pression » sur le régime des mollahs sont susceptibles d’avoir des répercussions pour Pékin et son approvisionnement pétrolier. Le futur conseiller à la sécurité nationale de l’administration Trump qui a été désigné, Mike Walz, s’est engagé à stopper ou réduire considérablement les revenus pétroliers de l’Iran, ce qui aura, selon lui, des retombées très positives sur les guerres en Ukraine et à Gaza.

Une analyse de près de cinq ans d’images satellites

« À 65 kilomètres à l’est de la péninsule malaisienne se trouve le plus grand point de rassemblement au monde pour les pétroliers clandestins. Des navires vieillissants, opérant souvent sous des pavillons de complaisance et sans assurance, viennent ici quotidiennement pour transférer leur cargaison à l’abri des regards indiscrets. C’est ainsi que des milliards de dollars de pétrole iranien sont acheminés chaque année vers la Chine, même si le pays, officiellement, n’en a pas importé une goutte depuis plus de deux ans », écrit Bloomberg au début de son enquête.

Les journalistes de Bloomberg ont analysé près de cinq ans d’images satellites de cette zone sensible et ont découvert l’ampleur insoupçonnée du trafic qui s’est développé au fur et à mesure que les États-Unis renforçaient leurs sanctions à l’encontre de l’Iran. Au cours des derniers mois, il arrive qu’il y ait parfois dans une seule journée plus d’une douzaine de rendez-vous entre tankers clandestins de la flotte fantôme iranienne et tankers chinois pour transférer les cargaisons.

Plus de 20 milliards de dollars

« Il est impossible d’évaluer avec précision la quantité de pétrole qui transite par ce canal. Même en faisant des hypothèses prudentes sur la taille des pétroliers, les données suggèrent que quelque 350 millions de barils de pétrole ont changé de mains dans ce point névralgique au cours des neuf premiers mois de cette année », écrit Bloomberg.

En tenant compte du prix moyen du baril de pétrole au cours de l’année 2024 et de la décote appliquée au brut clandestin, cela représente plus de 20 milliards de dollars. Et la valeur réelle des transactions est probablement bien plus élevée.

Une question de survie pour le régime des mollahs

Maintenant que l’ampleur du trafic a été révélée, que va faire l’administration Trump ? Elle pourrait commencer par s’en prendre aux entreprises chinoises impliquées par le biais de sanctions dites secondaires. Pour Téhéran, le risque est encore plus grand. La République islamique a absolument besoin des revenus pétroliers et manque cruellement d’acheteurs. Le système mis en place en mer de Chine méridionale est une question de survie.

Pour Pékin, qui n’est pas liée par les restrictions imposées par les États-Unis à l’Iran et qui ne les reconnaît pas, les importations clandestines de barils iraniens via un réseau d’intermédiaires et de navires appartenant à des sociétés écrans permet aux petites raffineries chinoises d’accéder à du pétrole bon marché. Il est construit aussi pour protéger les grandes entreprises chinoises des sanctions secondaires américaines. Les États-Unis peuvent restreindre ou exclure totalement l’accès à leur système financier de toute entreprise ou personne soupçonnée de commercer avec l’Iran.

Le risque existe aussi pour le gouvernement de Malaisie qui a détourné pudiquement le regard d’un trafic qu’il ne peut pas ignorer et a, par ailleurs, des liens étroits avec l’Iran et la Chine.

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