Le rythme trop faible du développement de l’infrastructure de rechargement est un des problèmes qui explique le manque d’enthousiasme de la majorité des automobilistes pour la motorisation électrique. Dans toutes les études et les sondages et presque dans tous les pays, le nombre insuffisant de bornes publiques (accessibles au public) est désigné comme un obstacle à l’achat d’un véhicule électrique. En outre, elles offrent des puissances souvent trop faibles pour effectuer des recharges rapides et ne sont pas toujours faciles d’utilisation entre les contraintes d’abonnements, de moyens de paiement et d’indisponibilités. En outre, le modèle économique de la recharge rapide et donc puissante est très incertain et les propriétaires de réseaux ont les plus grandes difficultés à rentabiliser leurs investissements et à en financer de nouveaux.
A tel point que quatre spécialistes européens de la recharge rapide, Electra (France), Ionity (Allemagne), Fastned (Pays-Bas) et Atlante (Italie) ont créé au printemps dernier une alliance commerciale, la Spark Alliance, pour tenter de doper leur rentabilité. Car les coûts techniques et économiques d’installation et aussi de maintenance sont très élevés. Et il faut y ajouter les changements continus de la régulation et des normes à l’échelle européenne.
Explosion des cyberattaques et vols de câbles de cuivre
La filière fait aussi face à une véritable explosion des cyberattaques contre les réseaux de bornes. Les cybercriminels exploitent les failles de télécommunication des installations pour voler des données sensibles, perturber des services et rançonner les exploitants. Enfin, pour couronner le tout, les stations de recharge sont maintenant la victime de dégradations et de vols de plus en plus fréquents de vols de câbles. Pour les gangs de ferrailleurs, c’est un nouveau gisement facilement accessible et non protégé de grandes quantités de cuivre. Cela fait beaucoup.
Mobilians, un syndicat professionnel qui représente 180.000 entreprises du secteur de la mobilité, donne l’alerte. Dans un communiqué, il souligne l’augmentation inquiétante de vols de câbles sur les infrastructures de recharge, notamment en Seine-et-Marne et dans le Nord. « Ces dernières semaines, de nombreux sites ont été victimes de ces vols, compromettant la continuité du service de recharge au public et freinant le développement de la mobilité électrique dans ces territoires. Qu’elles soient situées dans des zones commerciales, des quartiers résidentiels ou des espaces périurbains, ces bornes sont la cible de vols répétés, parfois à quelques jours d’intervalle ».
Et ce n’est pas une coïncidence, à la Bourse des métaux de Londres les cours de la tonne de cuivre ont atteint leur plus haut niveau historique au cours des derniers jours à 11.705 dollars la tonne. Depuis le début de l’année, les prix du métal rouge ont augmenté de plus de 30%.
Une centaine de câbles coûte entre 150.000 et 180.000 euros
Le coût des vols pour les opérateurs des stations peut être très important. Le préjudice lié à la dégradation d’une centaine de câbles se chiffre entre 150.000 et 180.000 euros pour le seul remplacement du matériel, note l’organisation. À cela s’ajoutent l’immobilisation des infrastructures, les pertes d’exploitation et le coût des réparations. Lorsque les installations appartiennent au réseau public, ce sont les collectivités qui supportent l’impact financier. Et puis les assureurs sont plutôt réticents à couvrir ce type de sinistre ou le font à des tarifs prohibitifs.
Et apparemment, les auteurs des vols agissent de manière coordonnée et très organisée. « Nous sommes confrontés à un phénomène structuré et en pleine expansion qui menace la fiabilité des réseaux de recharge. Une action rapide, coordonnée et soutenue par les autorités est indispensable pour éviter sa généralisation. Quelques interpellations ciblées suffiraient à inverser la tendance, comme l’ont démontré certaines expériences européennes », affirme Alain Rolland, président des métiers de la recharge chez Mobilians.
Rendre les installations moins vulnérables
Mobilians et l’ensemble des opérateurs demandent aux pouvoirs publics d’intégrer les stations de recharge dans des dispositifs renforcés de surveillance. Elle demande aux maires et aux gestionnaires de zones commerciales de renforcer l’éclairage, sécuriser les abords et connecter les dispositifs de vidéoprotection aux systèmes de détection des opérateurs avec une alerte directe auprès des forces de l’ordre.
Il existe aussi des possibilités techniques pour rendre les installations moins vulnérables. Il s’agit du renforcement des câbles avec des gaines métalliques ou des tressages anti-coupure. Mais cela augmente considérablement les coûts et ne garantit pas d’ailleurs une inviolabilité totale. Certains experts estiment aussi possible de modifier les architectures de bornes en privilégiant des câbles plus courts ou des têtes interchangeables afin de limiter le coût des réparations.
Le risque aujourd’hui est que certains opérateurs soient contraints de revoir leur infrastructure en installant des bornes moins puissantes et donc moins attractives pour les voleurs. Voilà qui ne pas contribuer à accélérer le développement des véhicules électriques.














