Les Certificats d’économies d’énergie (CEE) sont financés à hauteur de 5 à 6 milliards d’euros par an depuis 2019. Ils sont très critiqués par plusieurs rapports récents. Ce qui n’empêche pas les pouvoirs publics d’adorer un dispositif pervers et inefficace, car il fait payer aux fournisseurs d’énergie et donc directement au consommateur la politique énergétique du gouvernement. Ainsi, le montant des CEE pourrait tripler dans les prochaines années. On parle d’une quinzaine de milliards d’euros… Une paille !
Créé en 2005, ce dispositif fonctionne de la façon suivante. Il contraint les grands fournisseurs d’énergie à financer des actions d’économies d’énergie, afin d’atteindre un objectif pluriannuel au prorata de leurs ventes. S’ils n’atteignent pas leurs objectifs, ils doivent payer une très forte amende en fin de période (environ trois fois le prix des CEE manquants). TotalEnergies, Engie, EDF et les autres fournisseurs peuvent évidemment répercuter le coût des CEE sur les factures énergétiques des ménages et des entreprises. Donc, ils remplissent coûte que coûte leurs obligations en finançant des économies d’énergie… à l’efficacité parfois très douteuse.
Le consommateur dindon de la farce
Tout le monde est content, sauf le consommateur et son pouvoir d’achat. L’État lance de grands programmes d’économies d’énergie et de décarbonation qu’il ne finance pas. Et les fournisseurs d’énergie répercutent intégralement le surcoût. Un dispositif caractéristique de la technocratie française qui est à la fois complexe, coûteux et d’une efficacité contestable et difficile à mesurer. Il est piloté par la trop fameuse direction de l’énergie et du climat (DGEC).
Les CEE sont formulés en économie d’énergie finale théorique cumulée sur la durée de vie d’une action. Ces économies sont calculées en MWh cumulés ou MWhc. Ce qui représente, par exemple, 140 MWh cumulés sur trente ans pour l’isolation de 100 m2 de combles. Il existe un marché des MWhc sur lequel les fournisseurs peuvent échanger des MWhc. Le cours actuel est de l’ordre de 8,5 €/MWhc.
Une efficacité totalement surévaluée
Jusqu’à aujourd’hui, les CEE concernaient surtout le logement et aussi plus récemment le fameux leasing social sur l’achat de véhicules électriques. Le logement concentre deux-tiers des primes CEE qui sont en majorité cumulées aux aides MaPrimeRénov’ pour un total d’environ 5 milliards par an, principalement pour l’isolation des combles et les changements de chauffage.
Les gouvernements récents adorent mettre en avant les CEE pour atteindre les objectifs européens d’économies d’énergie et leur attribuent un gain extraordinaire de 24 TWh par an, 1,5% de la consommation d’énergie du pays. Du coup, les pouvoirs publics envisagent de tripler les montants de ce dispositif hors budget.
Le problème de taille est que l’efficacité des CEE est très surestimée. Plusieurs évaluations récentes dénoncent son coût élevé, des effets très surcotés et des fraudes massives… au point que la Cour des comptes recommande sa suppression. Les CEE sont un vrai gaspillage pour les raisons suivantes:
-Ils sont de fait une taxe supplémentaire sur les factures d’énergies prélevée par les fournisseurs de carburants, de gaz et d’électricité. Elle représentait 8 à 9 centimes le litre de carburant et entre 0,7 et 0,9 centimes le KWh en 2023-2024 selon la Cour des comptes, la CRE et l’UFIP. Cela représente plus de 6 milliards par an payés aux 2/3 par les ménages, soit 160 euros par an en moyenne.
-Le système permet aux intermédiaires de s’en mettre plein les poches et de capter environ 25% des financements… Des fournisseurs d’énergie aux vendeurs de fichiers de démarchage, les « frais et marges » sont estimés entre 20 et 30% par la Cour des comptes. Les inspections ont même atteint le taux incroyable de 55% pour les fameuses « isolations à 1 euro » selon une étude de l’Ademe.
-Enfin, l’impact réel des travaux financés n’a rien à voir avec l’impact « théorique » dont la France se vante auprès de l’Union européenne. Elle déclare plus de 20 TWh/an d’économies d’énergie depuis 2020 dont 15 TWh/an pour le résidentiel. Avec de telles performances, la consommation d’énergie des logements aurait dû baisser de plus de 25% depuis 2014 grâce aux seuls CEE… Elle n’a diminué que d’environ 5%. Cela tient, entre autres, aux fraudes multiples. La Cour des comptes donne le chiffre de 25 à 33% de non-conformité des isolations et pompes à chaleur après des contrôles aléatoires.
Et encore plus préoccupant, la nouvelle période des CEE qui commence en 2026 pourrait voir un doublement des objectifs théoriques financés par un dispositif inefficace. Les objectifs actuels ont été atteints officiellement en surévaluant les performances, avec des fraudes massives et un gaspillage considérable de l’argent des Français. En augmentant largement les objectifs, le prix unitaire des CEE ne peut qu’être plus élevé. Sur le marché des certificats, plus l’obligation est difficile à atteindre, plus les prix sont élevés. La répercussion sur les factures d’énergie des CEE pourrait passer selon les estimations des rapports de l’Ademe ou de Colombus de 5-6 milliards d’euros par an à 15 milliards par an. Une folie!
L.T.














