Transitions & Energies

L’Allemagne ne parvient pas à réduire ses émissions de CO2


En dépit d’investissements massifs, ils atteindront 485 milliards d’euros en 2025, dans les énergies renouvelables (éolien, solaire, biomasse, hydroélectrique), l’Allemagne ne parvient pas à réduire ses émissions de carbone. Le pays n’atteindra pas ses objectifs climatiques en 2020, et sans doute en 2030. L’Allemagne présentée longtemps, notamment en France par les écologistes, comme le modèle de la transition énergétique est en échec. Ce pays riche dont les caisses publiques sont en excédent, dont les capacités technologiques sont considérables, dont l’opinion et l’électorat sont attachés aux questions environnementales – le parti écologiste vient juste d’arriver en deuxième position aux élections européennes – semble incapable de décarboner son économie.

Le modèle du tout renouvelable est-il réaliste? C’est la question que se posait il y a deux semaines en une le plus grand magazine allemand Der Spiegel avec le titre suivant: «Un travail bousillé en Allemagne» («Murks in Germany»). La une montre des éoliennes cassées, démontées et au loin la ville de Berlin. «L’«Energiewende», le plus grand projet politique en Allemagne depuis la réunification, pourrait bien échouer», écrit Der Spiegel

Entre 2000 et 2019, les énergies renouvelables sont passées en Allemagne de 7% à près de 35% de l’électricité produite. Mais la part de cette électricité renouvelable provenant de la biomasse (7%), considérée comme polluante, est presque aussi importante que celle provenant du solaire (7,2%). Tout aussi problématique, sur les 7700 kilomètres de nouvelles lignes électriques prévues, seules 8% ont été construites. «Une grande partie de l’énergie produite est perdue», souligne Der Spiegel. Enfin, les subventions massives garanties pendant 20 ans depuis 2000 pour développer les éoliennes, les panneaux solaires et le bio gaz issu de la biomasse doivent cesser l’an prochain. «Le boom de l’éolien est terminé», prévient Der Spiegel.

Les difficultés de l’Allemagne ont deux origines essentielles explique Capital: l’abandon du nucléaire et la dépendance au charbon et au gaz liée à l’intermittence des renouvelables. La chancelière Angela Merkel a pris en 2011 une décision majeure lourde de conséquences en programmant l’abandon de l’énergie nucléaire d’ici 2022, dans la foulée de la catastrophe de Fukushima. Si ce choix a été et est populaire, dans un pays où une partie importante de l’opinion est hostile depuis les années 1970 au nucléaire, il a bouleversé l’approvisionnement du pays en énergie. Il ne s’en est toujours pas remis.

Car l’Allemagne a tout misé sur les énergies renouvelables passées à 35% de sa consommation d’électricité, et prévoit de porter leur part à 65% d’ici 2030. Mais par définition leur production est intermittente, leur stockage coûteux et souvent impossible et il faut transporter cette électricité du nord où il y a du vent et les éoliennes au Sud-Ouest, centre de gravité de l’économie allemande, avec une importante déperdition. Et quand il n’y a pas de vent et de soleil, les centrales thermiques prennent le relais. Le pays doit importer du gaz russe et n’a pu réduire pendant des années sa dépendance au charbon, l’énergie fossile la plus polluante.

Berlin vient pourtant de décider au début de l’année de sortir du charbon avant 2038. La fermeture des mines et des centrales est programmée tout comme la reconversion des zones minières. Plus de  40 milliards d’euros seront consacrés au soutien des quatre Länder concernés. La tâche s’annonce socialement et politiquement compliquée. Les régions minières sont à l’ouest marquées par le déclin de la sidérurgie rhénane et à l’est touchées de plein fouet par l’effondrement des vieilles industries à la frontière polonaise. En ex-RDA, dans le Brandebourg et la Saxe, le bassin minier est devenu sans surprise un bastion de l’extrême droite.

 

 

 

 

 

La rédaction