<i class='fa fa-lock' aria-hidden='true'></i> « L’acceptabilité citoyenne, variable décisive de toute trajectoire de transition »

10 octobre 2025

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« L’acceptabilité citoyenne, variable décisive de toute trajectoire de transition »

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Dans une étude importante publiée le 9 octobre, l’Institut Montaigne fait un constat très critique de la façon dont est menée la transition énergétique dans les transports en France. Sa conclusion est évidente, sauf depuis des années pour les pouvoirs publics et les militants dogmatiques, si elle se traduit par un appauvrissement et une stigmatisation des populations les plus modestes, elle n’a aucune chance de réussir. Et ce n’est pas une question de rejet de la transition par principe, qui n’existe pas ou peu, mais de conséquences économiques et sociales. « L'injonction à changer sans possibilité de le faire provoque un sentiment d’injustice, voire de colère… », souligne l’étude. L'Institut alerte d’ailleurs sur « le risque » de provoquer une poussée de mécontentement, comme ce fut le cas lors du mouvement des Gilets jaunes. L’étude préconise pour « réussir la transition des mobilités d’abord d’en réviser le calendrier d’action, en replaçant l’investissement dans l’offre avant les restrictions sur la demande ».

Le secteur des transports est « le premier secteur émetteur de gaz à effet de serre en France et le seul où les émissions ne baissent pas », souligne l’Institut Montaigne dans une étude d’opinion publiée le 9 octobre. Menée auprès de 10.000 Français, le sondage montre « une très large adhésion à l’objectif de la transition ». Neuf Français sur dix « se disent concernés » par l’urgence climatique et 64% sont « prêts à changer leurs habitudes ». Pour autant, la transition écologique dans les transports « semble dans une impasse » avec des mesures « imparfaitement ciblées… L’opposition d’une grande partie de la population ne porte donc pas tant sur l’objectif que sur les politiques menées pour l’atteindre.

La conséquence d’un aveuglement depuis des années des pouvoirs publics et des militants dogmatiques sur les conséquences de mesures qui se traduisent par un appauvrissement et une stigmatisation des populations les plus modestes. « L’acceptabilité citoyenne, variable décisive de toute trajectoire de transition », résume l’Institut Montaigne.

« Les décisions prises ces quinze dernières années ont rendu quasiment impossible d’aligner de manière vertueuse la recherche d’un impact écologique positif, l’efficacité de la dépense publique, l’acceptabilité sociale et l’effet sur la compétitivité des entreprises et des agents économiques. Si les ambitions sont clairement affichées, la méthode et les arbitrages nécessaires à leur atteinte ont fait l’objet d’une attention très nettement insuffisante de la part des pouvoirs publics », explique Marie-Pierre de Bailliencourt, la Directrice générale de l’Institut Montaigne.

« Des contraintes immédiates sans solution viable »

L’Institut Montaigne dénonce ainsi des mesures à la fois trop contraignantes et mal expliquées. Par exemple, l’instauration des zones à faible émission, les fameuses ZFE. En imposant « des interdictions ou une fiscalité accrue sans alternatives crédibles à court terme, les pouvoirs publics ont inversé le calendrier de la transition ». C’est une « erreur » qui place « de nombreux ménages, surtout ruraux, face à des contraintes immédiates sans solution viable », tance l’Institut Montaigne. Résultat, l’Assemblée nationale a voté en juin dernier, et à la surprise générale, leur suppression

Autre exemple de mesure qui s’est aliénée une partie de la population, la taxe carbone qui a été un des éléments déclencheurs de la révolte des Gilets jaunes. « Pour la taxe carbone, ceux qui étaient les premiers touchés par ces dispositifs n’avaient le plus souvent aucune solution de rechange », souligne Nicolas Laine, le responsable de l’étude. Il déplore des « discours excessivement centrés sur l’écologie et pas assez sur les bénéfices individuels comme la santé ».

Le leasing social n’a presque aucun impact

Nicolas Laine rappelle que « pour un ménage de la classe moyenne, l’achat d’un véhicule électrique neuf, c’est l’équivalent d’un an de revenus », d’autant que dans « les zones rurales et les périphéries, l’offre de transport en commun est souvent très insuffisante ». S’agissant des aides de l’État, quand elles existent, elles sont souvent « imparfaitement ciblées ». Ainsi, « le bonus écologique profite à 80% à la moitié des ménages les plus aisés et il est réservé aux seuls véhicules neufs ».

Quant au leasing social, c’est presque uniquement une mesure de communication compte tenu de son ampleur extrêmement limitée. Il « concerne une partie infime du parc, 0,1% des voitures en circulation » ajoute Nicolas Laine. « Vous avez des milliers de ménages, surtout dans les zones rurales, qui se retrouvent sans aucune alternative. »

Sentiment d’injustice et de colère

Pour les ménages modestes, « les dispositifs publics, comme le bonus écologique ou le leasing social », sont mal « ciblés », ou souffrent d’une « diffusion trop restreinte pour compenser l’absence de marché de l’occasion électrique et l’inégale couverture des transports collectifs ».

« L’injonction à changer sans possibilité de le faire provoque un sentiment d’injustice, voire de colère chez un quart des Français interrogés par l’Institut ». Du coup, l’Institut alerte sur « le risque » de provoquer une poussée de mécontentement, comme ce fut le cas lors du mouvement des Gilets jaunes, ou d’aboutir à décourager la population à un moment où l’adhésion des Français est « indispensable pour accélérer la transition ».

L’étude préconise pour « réussir la transition des mobilités d’abord d’en réviser le calendrier d’action, en replaçant l’investissement dans l’offre avant les restrictions sur la demande ». Il faut « une plus grande participation des usagers des services de transport collectif à leur financement », ce qui impose de ne pas « favoriser des dispositifs comme la gratuité des transports en commun ». Enfin, il est « impératif de recentrer le récit de la transition des mobilités sur ses bénéfices concrets, ancrés dans les usages quotidiens et les spécificités des territoires », recommande l’Institut Montaigne. « Il s’agit désormais de piloter la transition comme une séquence plutôt qu’une juxtaposition de mesures isolées, afin de construire un mix à la fois efficace sur le plan écologique, acceptable socialement et soutenable industriellement comme budgétairement ».

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