<i class='fa fa-lock' aria-hidden='true'></i> Que se passerait-il si la Chine et l’Inde cessaient d’acheter du pétrole russe ?

8 août 2025

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Que se passerait-il si la Chine et l’Inde cessaient d’acheter du pétrole russe ?

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Pour faire pression sur Vladimir Poutine et mettre fin à la guerre en Ukraine, Donald Trump a décidé de mettre en place des sanctions dites secondaires et de s’en prendre aux pays qui achètent le pétrole russe. La Chine et l’Inde sont les cibles de la Maison Blanche. Ainsi, après avoir déjà imposé des droits de douane de 25% sur les importations indiennes, Donald Trump a publié le 6 août un décret imposant des droits de douane supplémentaires de 25% en raison des achats de pétrole russe par l'Inde. Ils pourraient entrer en vigueur dans trois semaines. Si c’est le cas et si la Chine est visée également, cela aura un impact à la fois sur l’économie russe et sur le marché mondial du pétrole. La disparition rapide du marché mondial d’une grande partie des 5 millions de barils que la Russie exporte par jour pourrait faire s’envoler les prix du pétrole au-delà de 100 dollars le baril.

Dans l’arsenal des menaces que fait peser l’administration Trump sur la Russie pour la contraindre à cesser la guerre en Ukraine les sanctions sur les exportations pétrolières sont un élément majeur. Il faut dire que l’essentiel des ressources en devises de Moscou provient des exportations d’hydrocarbures et plus particulièrement de pétrole. Jusqu’à aujourd’hui les sanctions des pays occidentaux contre le pétrole russe ont eu une efficacité limitée. Elles ont contraint Moscou à trouver d’autres clients, notamment la Chine, l’Inde et la Turquie, et à leur vendre ses barils à prix cassés via notamment une flotte fantôme de tankers, mais cela a permis à la Russie de préserver l’essentiel de ses recettes en devises.

Mais les choses pourraient radicalement changer car la Maison Blanche a décidé de s’en prendre aux pays qui achètent le pétrole russe. Cela aura un impact à la fois sur l’économie russe et le marché mondial du pétrole.

L’Inde, première cible

Ainsi après avoir déjà imposé des droits de douane de 25% sur les importations indiennes, Donald Trump a publié le 6 août un décret imposant des droits de douane supplémentaires de 25% en raison des achats de pétrole russe par l’Inde. New Delhi a qualifié cette taxe supplémentaire « d’injuste, injustifiée et déraisonnable ».

Le Président américain a déclaré que ses droits de douane entreraient en vigueur dans 21 jours, laissant à l’Inde et à la Russie le temps de négocier avec l’administration américaine. Donald Trump doit annoncer d’autres sanctions secondaires à l’encontre d’autres pays et sociétés avec lesquels la Russie commerce du pétrole. La Maison Blanche a déclaré que les détails seraient communiqués vendredi 8 août, sans fournir plus d’informations.

L’impact des sanctions secondaires

Les achats de pétrole russe par l’Inde ont été multipliés par près de 19 entre 2021 et 2024, passant de 0,1 à 1,9 million de barils par jour, tandis que ceux de la Chine ont augmenté de 50% pour atteindre 2,4 millions de barils par jour. La Chine est ainsi devenue le premier acheteur mondial de pétrole russe. Dans le même temps, les pays européens ont ramené de 3,5 millions de barils par jour à 0,4 million leurs achats de pétrole russe. Selon les calculs de Petras Katinas du Center for Research on Energy and Clean Air (CREA), l’Inde aurait économisé jusqu’à 33 milliards de dollars entre 2022 et 2024 en achetant des barils russes bon marché.

Si la situation n’évolue pas, l’Inde devra très vraisemblablement renoncer au pétrole russe. Car les sanctions secondaires « mettent en péril l’accès des entreprises indiennes au système financier américain et exposent les banques, les raffineries et les compagnies maritimes à de graves répercussions compte tenu de leur intégration dans les marchés mondiaux », explique Petras Katinas.

Un coup à l’économie russe

Pour la Chine la situation est différente car Pékin a les moyens de résister aux pressions américaines et de répliquer comme il l’a déjà fait dans le domaine stratégique des terres rares. Le gouvernement chinois a d’ailleurs annoncé son intention de ne pas céder « à la coercition et aux pressions ». Pour autant, Les banques chinoises refusent de plus en plus les transactions russes, même en yuan, obligeant Moscou à recourir à des intermédiaires opaques et à des solutions de contournement via des pays tiers.

En tout cas, les sanctions secondaires annoncées pourraient porter un coup très dur à l’économie russe, déjà affectée progressivement par les sanctions occidentales. Avec des dépenses militaires dépassant désormais 6% du PIB et une inflation réelle estimée par certains analystes à 15-20% au lieu de 9% officiellement, la Russie brûle ses réserves de devises et de liquidités, ce qui exerce une forte pression sur son budget et ses efforts d’armement. Pour les marchés mondiaux, de nouvelles sanctions pourraient aussi provoquer un choc sur les prix du pétrole qui sont restés assez faibles depuis des mois en dépit des soubresauts géopolitiques, notamment au Moyen-Orient.

Un baril de pétrole à plus de 100 dollars

Si les cinq millions de barils exportés quotidiennement par la Russie disparaissent du marché pétrolier, les analystes estiment que les prix du pétrole pourraient flamber, les pays concernés, Chine et Inde notamment, se précipitant pour trouver d’autres sources d’approvisionnement. Même si l’OPEP+, le cartel pétrolier élargi comprenant d’ailleurs la Russie…, a récemment augmenté sa production, il sera extrêmement difficile de remplacer un volume aussi important à court terme. « Il n’y a aucun endroit où trouver ces cinq millions [de barils] assez rapidement pour empêcher une flambée des prix du pétrole », affirme Alexander Kolyandr du Center for European Policy Analysis.

Dans le pire des cas, les cours du baril pourraient passer de 64-66 dollars actuellement à 110-120 dollars ce qui se traduirait un peu partout dans le monde par une augmentation soudaine de l’inflation, de l’ordre de 1%, qui pèserait évidemment sur l’activité économique déjà malmenée par la guerre commerciale lancée par la Maison Blanche.

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