Transitions & Energies
Mercedes-Benz VISION EQS, IAA 2019

L’avenir de la voiture est électrique, mais la transition ne sera pas rapide


Selon une étude fouillée de l’agence Bloomberg, l’avenir est aux véhicules électriques dont la progression est jugée irrésistible. Mais cette révolution sur les routes prendra au moins deux décennies.

En matière de véhicules électriques, les prévisions sont particulièrement hasardeuses. Qui aurait pu prévoir la pandémie de coronavirus et quel impact aura-t-elle sur le marché automobile dans les prochaines années? En 2006, Carlos Ghosn, alors patron de l’alliance Renault-Nissan, annonçait de façon péremptoire que les ventes de voitures électriques représenteraient 10% du marché mondial en 2020… Elles seront à moins de 3%. Et selon l’étude annuelle de l’agence Bloomberg sur les véhicules électriques, les 10% de parts de marché seront atteints en 2025. La progression de l’électrique sera ensuite spectaculaire et d’ici 2040, plus de la moitié des véhicules vendus seront électriques. Ces derniers représenteront 8% des véhicules sur les routes en 2030 et 31% en 2040. Une accélération assez incroyable.

Il y a deux façons de comprendre cette étude. Soit, en considérant qu’elle décrit la tendance irrésistible de conquête du marché automobile mondial par l’électrique. Soit, en jugeant que la transformation électrique du transport routier prendra des décennies. Mais peut-il en être autrement compte tenu de l’ampleur et de l’échelle de cette révolution. Il y a aujourd’hui près de 1,4 milliard de véhicules sur les routes dans le monde.

Mais les prévisions de Bloomberg NEF ont deux faiblesses. Elles prolongent des tendances qui s’accélèrent à partir de la fin des années 2020. Dans la «vraie vie», ce type d’évolution n’est jamais rectiligne. Ensuite, l’agence se montre particulièrement optimiste sur la multiplication à venir des capacités de production des batteries et des matières premières indispensables à la fabrication de ses mêmes batteries.

En tout cas, il est fort possible, d’après l’étude, que les ventes dans le monde de voitures à moteur thermique aient atteint leur sommet en 2017. En voici les principales conclusions:

-Nombre de modèles électriques en vente

Les constructeurs ont multiplié les lancements de nouveaux véhicules électriques, sous la pression notamment des normes européennes d’émissions de CO2. Même si la pandémie de Covid-19 devrait retarder le lancement de certaines nouveautés, il y aura plus de 500 modèles différents de voitures électriques en vente d’ici 2022. «Le choix offert aux consommateurs et des prix compétitifs seront la clé pour attirer de nouveaux acheteurs», écrit Bloomberg.

-Ventes de véhicules électriques

Les ventes de voitures électriques dans le monde sont passées de 450.000 en 2015 à 2,1 millions en 2019. Elles devraient revenir à 1,7 million cette année du fait de la pandémie. Mais pour Bloomberg, il ne s’agit que d’un incident «avant qu’elles augmentent à nouveau du fait de la baisse du prix des batteries, de l’amélioration de la densité énergétique, de la construction de nouvelles infrastructures de chargement et de la diffusion de ses véhicules sur de nouveaux marchés». Ainsi, les ventes de véhicules électriques devraient atteindre 8,5 millions en 2025, 26 millions en 2030 et 54 millions en 2040.

-Pourcentage de véhicules électriques vendus

La part des véhicules électriques dans les ventes totales reste faible. Elle devrait être de 2,7% cette année, mais atteindre 10% en 2025, 28% en 2030 et 58% en 2040. Les marchés européens et chinois seront même bien au-delà de ses chiffres, mais la pénétration de l’électrique sera plus faible dans les marchés des pays émergents.

-Taille de la flotte mondiale de véhicules électriques

La flotte mondiale électrique passera de 8,5 millions de véhicules en 2020 à 116 millions en 2030, un bond considérable. Mais cela représentera encore bien moins de 10% du nombre de véhicules en circulation. Selon Bloomberg, «les véhicules hydrides joueront encore un rôle dans les dix prochaines années avant de disparaître quand les véhicules purement électriques deviendront de moins en moins chers».

-Demande de pétrole

Les véhicules électriques permettent d’ores et déjà de réduire la demande de pétrole dans le monde d’environ 1% (par rapport aux chiffres de 2019), ce qui représente un million de barils par jour. Selon Bloomberg, du fait notamment des conséquences de la pandémie, la consommation de pétrole par les voitures ne devrait jamais retrouver son niveau de 2019. Mais la croissance de l’utilisation des véhicules commerciaux à moteurs thermiques devrait se traduire par une augmentation de la demande de pétrole par le transport routier jusqu’en 2031. Ensuite, la décrue devrait être rapide. En 2040, la baisse de la consommation de pétrole liée à l’électrification des véhicules devrait atteindre 17,6 millions de barils par jour.

-Demande d’électricité

Contrairement aux craintes, l’augmentation du nombre de véhicules électriques sur les routes devrait avoir un impact relativement limité sur la demande d’électricité. D’ici 2040, les voitures électriques consommeront 1.290TWh (Térawatts/heure), les véhicules commerciaux 389TWh, les bus électriques 216TWh et les deux roues électriques 69TWh. Tout cela représente une augmentation de la demande électrique de 5,2%. «Et dans de nombreuses économies avancées, les véhicules électriques empêcheront la demande d’électricité de baisser».

-Emissions de CO2

Les véhicules électriques à batteries et à pile à combustible (hydrogène) devraient réduire les émissions de CO2 de 2.57 Gt (Gigatonnes) par an d’ici 2040. Mais les émissions totales liées au transport routier seront encore alors supérieures de 6% à ce qu’elles étaient en 2019. En fait, les émissions de CO2 liées au transport routier devraient augmenter jusqu’en 2033… si les prévisions de Bloomberg d’accélération des ventes de véhicules électriques se vérifient.

 

La rédaction